mercredi 8 mars 2017

8 mars 2017 : rencontres d'un autre type ou les joies de la découverte


J’ai voulu écrire mon journal, l’envie de dormir m’en a empêché
D’ailleurs, des événements d’une journée, lequel noter,
lequel laisser de côté, j’ai toujours du mal à en juger
(Shuntarô Tanikawa, L’ignare, trad. Dominique Palmé, Cheyne, 2014)


Il y a des jours plus propices aux rencontres avec des inconnus ou quasi-inconnus que d’autres... Le destin ? Le hasard ? L’inattendu ? Le monde est finalement plus riche de possibilités qu’on ne le croit. Seule la pantalonnade électorale écœurante actuelle (qui me fait regretter de ne pas être sur un cargo pour n’en rien savoir) pourrait nous faire croire le contraire.

Ainsi, en l’espace de deux jours, j’ai rencontré Sonja et Guilhem, deux randonneurs cyclistes catalans heureux, de retour d’un parcours de 13 000 km qui les a emmenés de Barcelone jusqu'au sultanat d’Oman à travers l’Europe et le Moyen-Orient, participé à une nouvelle réunion des Amis de l’Utopia 33, revu Grégory, le "fiancé" landais rencontré en 2012 lors de mon voyage à Tanger (voir mon blog du 5 mars 2012), enfin marié et qui m’a présenté sa femme marocaine et son bébé, et découvert l’artiste cinéaste Simon Quéheillard venu présenter ses œuvres.

Une arrivée colorée
C’est par le site Warmshowers, qui permet de mettre en relation les randonneurs cyclistes et des hébergeurs potentiels, que Sonja et Guilhem ont abouti chez moi, après un retour d’Oman par avion. Je suis inscrit sur le site depuis 2014, mais c’est seulement cette année que j’ai hébergé mes premiers cyclo-randonneurs, Tony en janvier, et les deux Catalans lundi 6 mars. Dans les deux cas, ce fut mémorable. Mes deux Catalans (29 et 31 ans) ne manquent pas de force : leurs vélos surchargés de bagages pèsent autour de 50 kgs (un peu plus pour Guilhem, un peu moins pour Sonja), et les transporter par avion est une épreuve. Après les avoir installés chez moi, je leur ai fait manger les reliefs du festin familial de la veille, puis les ai promener à la découverte de la ville, où nous sommes allés à pied, et pendant qu’ils sont rentrés préparer le repas du soir, je suis allé à la réunion des Amis de l’Utopia 33 où, à défaut de refaire le monde, nous espérons mettre en place une aide ponctuelle à l’animation de ce petit complexe cinématographique d’excellente qualité.

Un festin pour l'hôte !
En rentrant en V3 (le vélib bordelais), je n’ai eu qu’à mettre les pieds sous la table et à déguster l’honorable tortilla catalane accompagnée de toasts préparés par mes deux invités. J’apprends que de tous les pays visités lors de leur périple, le préféré fut l’Iran, où l’accueil populaire fut formidable, aussi bien chez l’habitant que pour planter leur tente. Comme quoi la propagande occidentale médiatique anti-iranienne est à prendre avec des pincettes. Ils vont rentrer à Barcelone en longeant la Garonne puis le Canal du Midi jusqu’à Carcassonne, se reposer quelques mois, puis repartir visiter cette l’Asie centrale musulmane (les ex-républiques soviétiques ouzbèkes, turkmènes, kirghizes et tadjikes). Leur site internet est en construction. Et, mardi matin, après ma séance de kiné, je les ai raccompagnés à vélo jusqu’au Pont de pierre pour leur dire au revoir... Qui sait ?

devant le Monument des Girondins

Depuis 2012, j’avais perdu de vue Grégory et ses problèmes matrimoniaux. Mais j’ai le privilège qu’on aime garder mon contact, et il y a trois semaines, il m’a téléphoné pour me dire qu’il serait ravi de me revoir et de me présenter sa petite famille. Chose faite donc depuis hier : ils sont venus à Bordeaux pour le renouvellement de la carte de séjour de Khadija – les arcanes de l’administration sont toujours aussi effrayants de lourdeur et de suspicion, heureusement qu’ils ont fait un enfant, car on le soupçonnerait de mariage blanc ! – et je les ai invités à déjeuner à la maison, vu le temps assez maussade qu’il faisait. Le bébé de onze mois, levé tôt, et qui n’avait guère dormi depuis, était assez grognon, mais tout s’est bien passé. Les retrouvailles ont été suffisamment fécondes pour qu’ils m’invitent à leur rendre visite à Lubbon, où ils habitent... Qui sait ?






 De commencements en commencements 
    (image du film, cop blog de l'artiste)


Quant à Simon Quéheillard, venu présenter ses trois courts métrages Le travail du piéton (où des plans fixes nous montrent la bouche d’un escalator : des objets intrusifs, bouts de plastiques, cartons, cannettes, bouteilles en plastique, verres, viennent perturber à peine le passage des piétons), Maître-Vent, où le cinéaste, placé en bord de route s’efforce de de mettre en place des objets empilés (cartons, plastique, bois, parapluies) que les courants d’air engendrés par la circulation font vaciller puis voler, et De commencements et commencements (qui pourrait s'intituler De catastrophe en catastrophe), où des objets tombés du ciel perturbent la marche d’un piéton impassible sur les trottoirs d'une ville sans habitants. Ces films d’artiste font montre d’un sens du burlesque proche du cinéma muet ancien (Keaton, Laurel et Hardy, Chaplin) et m’ont paru d’une étonnante qualité visuelle (aucun dialogue, plans fixes, bande sonore très élaborée) : j’étais scotché devant cette poésie en images. Près de cent personnes assistaient à cette séance exceptionnelle. Peut-être reverrai-je cet artiste... Qui sait ?

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