lundi 22 juillet 2024

22 juillet 2024 : un peu de cinéma

 

      Nous ne supportons plus la durée. Nous ne savons plus féconder l’ennui.

    (Paul Valéry, Le bilan de l’intelligence, Allia, 2023) 

 

            Depuis deux mois, j'attendais l'été avec impatience. Il est enfin arrivé. Et j'en profite à plein depuis quelques jours : lever à 6 h pour profiter du vélo à la fraîche et avoir de longues matinées. Et très souvent l'après-midi, une ou deux séances au cinéma. Voici quelques notes sur des films récemment vus.

 


            Le moine et le fusil : ce film qui nous vient du Bhoutan (pays du BNB, Bonheur National Brut, ça a une autre gueule que notre PIB !) est non seulement beau par ses paysages, mais aussi par ses habitants, confrontés à un changement de régime politique ! Le roi abdique en faveur de la démocratie. Pour la première fois, on doit voter, et il faut apprendre. Ce n'est pas si simple ! Des fonctionnaires zélés vont donc venir en aide aux Bhoutanais. Et que viennent faire un moine, un fusil et un Américain qui convoite ledit fusil ? Vous le saurez en allant vois ce film beau, sensible, hilarant par moments et terriblement humain. Et ça fait du bien !!! Ma meilleure nouveauté de l'année.


            El profesor, un film argentin qui conte les luttes de pouvoir au sein d'une faculté de philosophie, après la mort inopinée du titulaire de la chaire. Son assistant, Marcello, est un formidable pédagogue (il faut le voir parler du Contrat social de Rousseau à ses étudiants !), mais timide et introverti, et il n'est pas choisi pour hériter de la chaire. Dialogues étincelants, acteurs épatants. Je le reverrai bien avec plaisir.


            Pourquoi tu souris ?, avec le trio Emmanuelle Devos (en bénévole humanitaire impénitente), Jean-Pascal Zadi (en prétendu sans-papiers perpétuellement souriant) et Raphaël Quenard (SDF inénarrable en allergique au travail), est une comédie humaine. Les deux Pieds nickelés, pris en charge par la bonne samaritaine, essaient d'inventer des plans foireux pour s'en sortir. Ils vont croiser le chemin de la vieille dans indigne que joue Judith Magre (97 ans). Un régal, j'en pleurais de rire.    

                                    

          Une formidable reprise : Les 7 samouraïs, un pur régal que ce grand classique du cinéma. Je ne m'en lasse pas, et le revoir sur grand écran me rend chaque fois heureux. La copie est superbement restaurée. C'est un des dix films que je vais revoir systématiquement à chaque ressortie !

             Et en août, j'aurai droit à une rétrospective Pagnol (dont l'inédit pour moi Jofroi) et à plusieurs Visconti, de quoi me réjouir avant mon départ pour Venise le 29 août...

 

 

 

 

vendredi 12 juillet 2024

12 juillet 2024 : le poème du mois

 

            De toute son existence, mon père n’a jamais fermé la portière de la moindre voiture. Ma mère verrouille sa maison à cinq heures du soir. Deux visions du monde.

               (Alba Donati, La librairie sur la colline, trad. Nathalie Bauer, Globe, 2022)

 

            Voilà que le mois de juillet s'avance, que les jours ont commencé à raccourcir, que le temps est toujours médiocre, mais que je me sens bien ! Je continue mes lectures en EHPAD, les personnes très âgées (moyenne d'âge 95 ans) commencent à me bien connaître. Je choisis des textes narratifs brefs entrecoupés de poèmes ; lundi dernier, ils étaient un homme et six femmes (3 en fauteuil roulant), je leur ai donné du Christian Bobin, Paul Auster, Jean-Philippe Blondel, et des poèmes de Victor Hugo. Et, entre chaque lecture, je les ai laissé parler, à la fois de ce qu'ils venaient d'entendre et de ce qui leur passait par la tête. C'était sympa, une bouffée d'air venue de l'extérieur et très appréciée.

            J'ai retrouvé les documents de mes cyclo-lectures et vous livre un des poèmes qui avait fait un tabac auprès des auditeurs. J'avais dû, sur leur demande, relire une deuxième fois cette berceuse en fin de lecture.  


Dors mon enfant


Dors mon enfant dors

Quand tu dors

Tu es beau

Comme un oranger fleuri


Dors mon enfant dors

Dors comme

La mer haute

Caressée par la tempête

De la brise

Qui vient mourir en woua woua

Au pied de la plage sablonneuse


Dors mon enfant dors

Dors mon beau bébé noir

Comme la promesse

D’une nuit de lune

Au regard de l’aube

Qui naît sur ton travail


Dors mon enfant dors

Tu es si beau

Quand tu dors

Mon beau bébé noir dors


Eblongué Epanya YONDO

(Kamerun ! Kamerun ! Présence africaine, 1960)

 

dimanche 7 juillet 2024

7 juillet 2024 : chanson du mois : la Marseillaise revisitée

 

                 Plus d'armes, citoyens !

                Rompez vos bataillons !

                Chantons, chantons et que la paix

                Féconde vos sillons !

             (cité dans Mélanie Fabre, Hussardes noires : des enseignantes à l'avant-garde des luttes, de l'affaire Dreyfus à la Grande Guerre, Agone, 2004)


                J'ai appris la Marseillaise, du moins les deux premières strophes et le refrain à l'école du village. Je n'en étais pas spécialement fier : déjà féru d'histoire et admiratif de la Révolution française qui avait octroyé un statut de liberté à mes ancêtres protestants, je n'ignorais rien des circonstances qui avaient entouré la création de cette chanson. La France était menacée, tant par l'ennemi intérieur (royalistes, aristocrates, Vendéens...) que par l'Europe toute entière coalisée contre la République. Cela expliquait ces paroles guerrières qui, pourtant, me choquaient déjà. Heureusement, j'ai appris depuis, que notre hymne national avait vu ses paroles détournées à maintes reprises : il y eut une Marseillaise féministe des cotillons (1848), une Marseillaise anti-cléricale (1881), la Marseillaise des requins de Gaston Couté (1911), etc. 

              Je m'arrêterai en particulier  sur le détournement par des enseignantes  des débuts de la IIIème République (1892), remis au goût du jour par Chanson plus bifluorée, sous le titre La Marseillaise de la paix :

              Pour l'écouter : https://www.youtube.com/watch?v=pBJ_93pHouc


Marseillaise de la paix

Adaptation Chanson Plus Bifluorée / C.J. Rouget de Lisle

Cette version de la Marseillaise fut d’abord chantée dans l’orphelinat expérimental de Cempuis (Oise) dirigé par le pédagogue libertaire Paul Robin (1837-1912)

De l'universelle patrie
Puisse venir le jour rêvé
De la paix, de la paix chérie
Le rameau sauveur est levé (bis)
On entendra vers les frontières
Les peuples se tendant les bras
Crier : il n'est plus de soldats !
Soyons unis, nous sommes frères.

Refrain :
Plus d'armes, citoyens !
Rompez vos bataillons !
Chantez, chantons,
Et que la paix
Féconde nos sillons !

Quoi ! d'éternelles représailles
Tiendraient en suspens notre sort !
Quoi, toujours d'horribles batailles
Le pillage, le feu, et la mort (bis)
C'est trop de siècles de souffrances
De haine et de sang répandu !
Humains, quand nous l'aurons voulu
Sonnera notre délivrance !

Refrain

Plus de fusils, plus de cartouches,
Engins maudits et destructeurs !
Plus de cris, plus de chants farouches
Outrageants et provocateurs (bis)
Pour les penseurs, quelle victoire !
De montrer à l'humanité,
De la guerre l'atrocité
Sous l'éclat d'une fausse gloire.

Refrain

Debout, pacifiques cohortes !
Hommes des champs et des cités !
Avec transport ouvrez vos portes
Aux trésors, fruits des libertés (bis)
Que le fer déchire la terre
Et pour ce combat tout d'amour,
En nobles outils de labour
Reforgeons les armes de guerre.

Refrain

En traits de feu par vous lancée
Artistes, poètes, savants
répandez partout la pensée,
L'avenir vous voit triomphants (bis)
Allez, brisez le vieux servage,
Inspirez-nous l'effort vainqueur
Pour la conquête du bonheur
Ce sont les lauriers de notre âge.

 


                    Plus tard,  j'avoue un faible pour Graeme Allwright (que nous vîmes, Claire et moi, au Festival des Musiques du monde de Vivonne dans les années 90) qui, en 2005, revisita à son tour les paroles :   

Pour tous les enfants de la terre
Chantons amour et liberté.
Contre toutes les haines et les guerres
L’étendard d’espoir est levé
L’étendard de justice et de paix.

Pour tous les enfants de la terre
Chantons amour et liberté.
Contre toutes les haines et les guerres
L’étendard d’espoir est levé
L’étendard de justice et de paix.

Refrain
La flamme qui nous éclaire
Traverse les frontières
Partons, partons, amis, solidaires
Marchons vers la lumière.

                Pour l'écouter, c'est ici :

https://www.google.com/search?q=la+marseillaise+graeme+allwright&client=firefox-b-e&sca_esv=0f377be67df6cd70&sxsrf=ADLYWIKtFDfZWg062vzElroG5Xpf1MQ_JA%3A1720333961263&ei=iTaKZuDSD7iskdUPtMS0mAU&oq=la+marseillaise+graeme&gs_lp=Egxnd3Mtd2l6LXNlcnAiFmxhIG1hcnNlaWxsYWlzZSBncmFlbWUqAggBMgUQABiABDIFEAAYgAQyCBAAGIAEGKIESKVFUNoIWIYpcAJ4AJABAJgBXKAB5wSqAQE3uAEByAEA-AEBmAIJoALlBcICBxAAGLADGB7CAgsQABiABBiwAxiiBMICChAuGIAEGBQYhwLCAgoQABiABBgUGIcCwgIZEC4YgAQYFBiHAhiXBRjcBBjeBBjgBNgBAcICBhAAGBYYHsICCBAAGBYYHhgPmAMAiAYBkAYGugYGCAEQARgUkgcDNi4zoAeaIw&sclient=gws-wiz-serp#

mardi 25 juin 2024

25 juin 2024 : la poésie du mois : Andrée Chédid

 

            Seule

            vérité

            le temps

            que l’on met

            à grandir 

             (Jean-Pierre Thuillat, Dans les ruines, L’Arrière-pays, 2014)

 

        Et revoici "le poème du mois" que j'allais oublier. Il est vrai que j'avais posté un des miens hier.

        J'ai toujours beaucoup aimé Andrée Chedid. Je me souviens qu'on utilisait ses textes pour écrire nos propres textes. Elle nous servait d'atelier d'écriture, plus que tout autre auteur.


 

        Et nous aimions particulièrement celui-ci, qui était presque un poème-fétiche pour Claire, et une source de vie pour nous deux. Je n'en dis pas plus et vous le laisse méditer.

 

AU CŒUR DU CŒUR 

 

Au cœur de l'espace 

Le Chant 

 

Au cœur   du chant

Le Souffle


Au cœur du souffle

Le Silence


Au cœur du silence

L'Espoir


Au cœur de l'espoir

L'Autre


Au cœur de l'autre

L'Amour


Au cœur du cœur 

Le Cœur

 

(Andrée Chedid, Rythmes, Gallimard, 2002)

 

lundi 24 juin 2024

24 juin 2024 : 15 ans ont passé !

                     C'est l'héritage de ma mère. Elle l'aurait voulu. Elle nous a appris à aider ceux qui sont  dans le besoin. Elle s'y est employée toute sa vie.

                     (Alba Donati, La librairie sur la colline, trad. Nathalie Bauer, Globe, 2022)



            Eh oui, quinze ans depuis la terrible année 2009. Sans doute la plus terrible et la plus humaine de mon existence : l'apprivoisement de la mort. Celle où j'ai le mieux réussi à comprendre qu'il ne sert à rien d'avoir peur, que l'essentiel est de vivre jusqu'au bout, sans craindre les souffrances, les maladies, la mort qui approche. 

            Aussi, Claire, toi qui m'as appris tout cela, je tenais à te remercier du plus profond de mon cœur ; tu as enrichi mon âme, tu l'as peuplée d'une force incroyable, tu m'as "appris à aider ceux qui sont dans le besoin", à aimer les très vieux, les SDF, les sans-voix, les paumés, les déclassés, les mal-aimés, les opprimés, les exilés, les différents, les malades, les misérables... Je le fais aussi bien que je peux, et tu me manques pour faire encore mieux.

            Et voici le poème que j'ai écrit pour te remercier de tout ça :

             

                je t'aime autant que je t'aimais


je t'aimais, ô ma femme

je modelais l'argile de ton corps

j'écoutais le parfum de ton sein

je respirais au rythme de ton chant


je t'aimais, ô ma femme

je me faisais charrue pour labourer ton corps

et pour faire éclore des étoiles

dans le ciel de tes yeux


je t'aimais, ô ma femme

et la pâte de ton vivant gâteau

je l'enfournais dans le rond de mes bras

et ta chair toute chaude était une eau de feu


je t'aimais, ô ma femme

et le jour je brûlais

les restes de chaque nuit pour que ma peau

garde l'empreinte de la tienne


je t'aime toujours, ô ma femme

tu m'as enraciné

ta sève a fait de mon corps une cathédrale

dont la nef vogue sur l'océan


je t'aime toujours, ô ma femme

et si ton corps maintenant est borne trop lointaine

ton cœur reste le vent ardent

qui réchauffe ma provisoire vie


je t'aime toujours, ô ma femme

tu sèmes dans ma nuit des rêves en couleurs

ils deviennent les fruits de mon jardin intime

et dans ma nudité, j'en fais mes vêtements

 

                            Jean-Pierre 




 

samedi 22 juin 2024

22 juin 2024 : un voyage en Inde

 

                      Je ne mourrai pas dans cette maison. J’ai résolu de partir pour un lieu inconnu, où on ne saura qui je suis. J’irai peut-être tout droit à votre chaumière pour y mourir. Seulement, je le sais d’avance, vous me rudoierez ; nulle part, on n’aime les vieux.

                   (Léon Tolstoï, cité dans Alexandre Bergamini, Nue India, journal d’un  vagabond,  Arléa, 2014)

                 Puisque j'ai repris mes voyages - oh ! ce ne sont pas des pérégrinations en solo, comme Alexandre Bergamini, dont je viens de découvrir, grâce à la Bibliothèque municipale de Bordeaux, le récit de voyage  Nue India, journal d’un vagabond  (Arléa, 2014), où il raconte ses vagabondages dans l'Inde actuelle - je recommence à lire ce genre de livres. Je ne sais pas en quelle année il a fait ces errances dans un pays qui nous reste à maints égards mystérieux. Mais je présume qu'il avait déjà la quarantaine, et qu'il cherchait à faire le deuil de son frère aîné qui s'est suicidé à 18 ans, qu'il cite à plusieurs reprises ici.

            Ce qui le frappe d'entrée, c'est l'odeur de l'Inde (titre du premier chapitre) ou plutôt les odeurs, qui sont celles de l'humidité chaude, de la décomposition des animaux, de la promiscuité et de la misère humaines.  Mais peu à peu, il s'y fait, au point de se fondre dans la foule, de dormir par terre dans les temples, ou à proximité d'un éléphant, ou dans des lits crasseux. C'est qu'il ne fait pas un voyage organisé, il fuit les touristes comme la peste. En allant dans l'inconnu, il est en fait à la recherche de lui-même.

                Et il découvre ici la vacuité de son existence ordinaire : "Je me rendais l’existence impossible à vouloir agir, devenir, penser. Plus j’abandonne une résistance à être, et plus je me nourris et me ressource sans effort. Mes peurs sont un carcan d’oppression, un joug de hantises. Que puis-je réellement craindre, la perte ?" Il se découvre, au contact des autres, libéré de ses conditionnements, de la peur d'être soi-même. Que, même au milieu de la pire misère, des gens en haillons, affamés, atteints de la lèpre, il entre de plain-pied dans l'humanité, il commence à voir sa vie (et même la vie en général) "comme un privilège, et non comme un droit". Il "aspire plus à une vie juste plus qu’à une vie d’abondance".

            Il est bien obligé de voir les dégâts qu'a causés la colonisation occidentale ici comme ailleurs : ainsi, il constate sue les "éléphants sauvages n’existent plus. Comme les tigres, ils ont été décimés en majorité par des étrangers riches sans scrupule. Ils ont tué les tigres du haut des éléphants, puis tué les éléphants du haut d’hélicoptères. Que dire sinon que ces hommes sont la honte de l’humanité ?" Il se pose la question suivante : "Quelque chose de notre humanité a été altérée. Un souvenir du bonheur d’être nous sans limites. Comment étions-nous lorsque nous étions humains ?" Il reste lucide toutefois devant le spectacle des intouchables et le système ingrat des castes. Mais il arrive à créer des liens : la compassion, l'empathie, l'amitié peut-être lui paraissent possibles.

                Peut-être parce qu'il a fait un voyage en solitaire, dont il se félicite : "La solitude me réconforte. Je fuis les bruyants, les bavards, les touristes et les voyageurs malins qui cherchent un contact de compatriotes complices". Il comprend que ce pays lui a dessillé les yeux, lui a permis d'être "présent au monde, entier, en harmonie", et qu'en fait, il n'était "pas seul". Il termine en évoquant son amitié avec Abhilash, qui lui fait don d'une "fleur de frangipanier ; j'y sens mon âme", et avec qui il peut dire que "nos cœurs plongent dans les racines de la vie".

            Un beau livre, saisissant, qui nous réconcilie avec le vrai voyage, celui où on se déconnecte de sa vie originelle, où on se sent appelé "à [se] dépouiller, par rapport à [sa] vie passée, du vieil homme qui se corrompt par les convoitises trompeuses, à être renouvelés dans l’esprit de [son] intelligence, et à revêtir l’homme nouveau" (épître de Paul aux Éphésiens, chapitre 4, versets 21 à 24). Ce voyage si concret au milieu de la misère se transmue en voyage spirituel, ce que tout voyage devrait être : la rencontre des hommes (titre du beau livre de Benigno Cacérès, Seuil,1950), en somme.

         

 

 

mercredi 19 juin 2024

19 juin 2024 : Paris, juin 2024

                 Chaque homme vit sa vie de façon différente. 

                Les uns parlent sans discontinuer.                    

                Les autres sont familiers du silence. Certains ont besoin d’être entourés d’autres hommes  pour se sentir bien. 

                D’autres ne sont eux-mêmes qu’en se retrouvant seuls, au moins de temps en temps.

               (Gunnar Gunnarsson, Le berger de l’Avent, tard. Gérard Lemarquis, Zulma, 2019)

              

            Après Londres, ce fut Paris, où je suis allé très peu l'an dernier, pour cause de maladie. Le voyage en Eurostar s'est bien passé : pas de retard au départ cette fois. Comme d'habitude, j'ai été très bien reçu par mes cousins de Paris. Il a fait relativement beau, en tout cas, il n'a pas plu. Ce qui était bien pour le piéton de Paris que j'ai été.: par exemple, je suis revenu du Musée de Montmartre à pied, jusque chez mes cousins, qui habitent sur la rive gauche de la Seine, près de la place Maubert, soit environ 7 km., car j'ai pris le chemin des écoliers, en faisant un large détour rive droite vers la rue des archives, l'hôtel de ville, puis en contournant Notre Dame dans l'île de la Cité. Très belle promenade.

                                                 

                                                atelier de Suzanne Valadon

        Le mercredi, j'ai pu voir mon amie Christine P. Avec elle, on se dirige vers un musée ou une expo. Cette fois-ci, elle m'a proposé le Musée de Montmartre qui occupe la maison, l'atelier et le jardin de Suzanne Valadon (1865-1938), qu'elle habita à partir de 1896 jusque dans les années 20. Elle eut pour fils Maurice Utrillo (1885-1955), un peintre devenu célèbre lui aussi, éclipsant même sa mère. On a pu voir la chambre d'Utrillo, l'atelier de Suzanne, l'exposition permanente quicomprend de nombreuses toiles de Suzanne et d'Utrillo. Et puis, il y avait une belle rétrospective d'Auguste Herbin (1882-1960), peintre qui eut son heure de gloire, un peu oublié aujourd'hui, mais qui nous a permis de découvrir ses différentes périodes : post-impressionniste, fauvisme, cubisme, abstraction avant de revenir momentanément au figuratif (Les joueurs de boules) et de s'en détacher pour les formes géométriques et la peinture abstraite. Il est considéré comme un des maîtres de cette dernière tendance. Très belle exposition.

        Le lendemain fut ma journée "politique" avec un rassemblement organisé par Europalestine pour demander l'exclusion des athlètes israéliens des Jeux Olympiques, au même titre que les athlètes russes. Nombreuses prises de paroles de syndicalistes, de militants anticolonialistes, de partis de gauche, d'associations pour la paix et contre les bombardements incessants à Gaza, de femmes aussi. Je me sentais bien dans ce groupe d'environ 200 personnes, devant le siège du comité d'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris (COJOP) à Saint-Denis. Je regrettais qu'on soit si peu nombreux ! Depuis, des rassemblements ont eu lieu aussi à Lausanne et ils se perpétuent tous les jours à Saint-Denis.

                                  le drapeau palestinien devant le siège du Cojop (photo Europalestine)

        Enfin, le vendredi soir, j'ai invité mes cousins à aller au théâtre voir dans la petite salle du Lucernaire une pièce tirée du scénario de Marcel Pagnol pour son film Naïs (1945), scénario lui-même tiré d'une nouvelle de Zola, Naïs Micoulin (1883). J'avais vu le film lors d'un festival Pagnol dans les années 70. C'était un beau mélo, avec Fernandel dans le rôle de Toine, le valet de ferme bossu, amoureux de Naïs, la fille du métayer, veuf qui compte bien garder sa fille comme domestique à vie. Mais Naïs est amoureuse en secret du fils du propriétaire de la ferme. Je n'en dis pas plus, sinon que Toine va s'effacer et favoriser le projet des deux jeunes gens. Du mélo donc, émouvant et joué de belle façon dans la petite salle où nous étions tout près des actrices et acteurs. On a mangé au Lucernaire, qui fait aussi cinéma d'art et d'essai, librairie et bar-restaurant.

        Et le samedi, il ne me restait qu'à prendre le train pour rejoindre Bordeaux et voter le dimanche pour les Européennes. Ici, à Bordeaux, le Rassemblement National est arrivé en 4ème position, devancé par le PS, Renaissance, LFI et talonné par les écolos. Et, dans mon bureau de vote, LFI est arrivé en tête, et pourtant, je n'avais fait aucune propagande en sa faveur ! Mais le quartier est solidement ancré à gauche...


jeudi 13 juin 2024

13 juin 2024 : Londres mai-juin 2024

                    Vivre n'est pas une fin en soi. C'est la façon dont nous vivons qui compte.

              (Genki Wakamura, Et si les chats disparaissaient du monde..., trad.    Diane Durocher, Fleuve, 2022)  

         J'ai besoin de l'ordinateur pour écrire mon blog, et je dois dire que, parfois, j'ai envie d'arrêter définitivement.En tout cas, en déplacement, ce n'est pas le smartphone (ordinateur de poche sans doute, et les jeunes font tout avec, au point de ne pas pouvoir s'en passer) qui peut le remplacer ; pour moi, le smartphone est avant tout un téléphone (en plus moderne et plus compliqué) et, tant pis pour moi, je suis mal à l'aise avec cet engin. Donc, j'y ai mis très peu d'applications, et notamment pas le fameux GPS ! Ce qui ne m'a pas empêché de circuler seul à pied dans Londres (où il y a souvent de petits plans de quartiers qui permettent de se situer, bravo les Anglais) puis dans Paris (où ces petits plans bien commodes ont quasiment disparu, chacun est prié de trouver son chemin tout seul grâce à son "doudou technologique chéri").

        Le séjour à Londres s'est très bien passé. J'ai eu deux jours libres pour me promener tout seul, d'abord le vendredi 31 mai sur la rive gauche de la Tamise vers Canary wharf, le nouveau quartier d'affaires complémentaire de la fameuse City, avec ses beaux gratte-ciel. J'y ai visité le Museum of London docks, le genre de musée que j'affectionne, avec ses nombreuses maquettes de bateaux, son historique des ports de Londres et le rappel qu'ils ont joué dans le trafic d'esclaves. Rappelons, comme pour nombre de musées londoniens, l'entrée en est gratuite.

        Puis le lundi 3 juin, je partis également vers l'est et juste après la traversée du London bridge, je me suis baguenaudé longuement sur le rive droite, où travaille Lucile ; j'ai pu y acheter des cartes postale, devenues rares ! J'ai suivi les quais et j'ai fait une longue pause au Globe theater, le théâtre rond de Shakespeare, qui contient un café-restaurant, une boutique-librairie. Je me promets d'aller y voir une pièce de Shakespeare en novembre prochain en la lisant (ou relisant) en français auparavant. et je suis revenu par une passerelle reprendre le métro rive gauche, après avoir parcouru cinq ou six km fort agréables.

        Le samedi et le dimanche, ce fut des journées en famille, puisque Lucile et Pierryl ne travaillaient pas et que Sasha n'était pas à la crèche. Le samedi, on a emmené Sasha au Young V&A Museum of childhoor,musée entièrement consacré aux enfants de tous âges. En tout cas, pour les petits c'est fabuleux, ils s'y éclatent à grimper, ramper, enjamber, faire de l'équilibre etc. Sasha n'était pas la dernière, évidemment !

                                                        Hyde Park : la pagode

        Le jour suivant, ciel bleu étincelant. Dès le matin, nous sommes allés à une ferme éducative située à 500 m à peine : Sasha a pu y voir des moutons, des chèvres, des ânes, des animaux de basse-cour. il y avait un petit marché bio. C'était super sympa, les parents accompagnent leurs enfants. Puis on a continué vers Hyde park, où on a pique-niqué avec des amis qui ont aussi des enfants en bas âge. Il y avait au moins deux emplacements de jeux pour enfants. Et, au bord du lac, on a pu voir des cygnes, avec leurs petits qui, comme disait Andersen dans Le vilain petit canard, ne laissent pas soupçonner la beauté qu'ils auront plus tard.

        Le nouvel appartement de Lucile et Pierryl est très silencieux. De leur balcon du 1er étage, ils ont vue sur un canal avec une écluse. Les oiseaux aquatiques y sont nombreux : foulques, poules d'eau, oies, canards avec leurs petits, et même des cygnes et un héron. Les rives du canal ont des chemins cyclables et piétonniers. C'est par un de ces chemins qu'ils emmènent à vélo Sasha à la crèche sur un siège, ou en poussette quand j'étais là. Elle est ravie de longer le canal pour y aller.

        Sasha est très vive : elle s'agite sans cesse, court plus qu'elle ne marche et donc très difficile à photographier. Elle commence à parler dans un subtil mélange de français et d'anglais que ses parents comprennent, ce qui n'était pas mon cas. Mais quand je lui parle, elle me comprend et aime bien aussi que je lui lise des petits albums ou que je lui chante les chansons enfantines que je (et elle) connais. Ses parents s'en occupent bien !

                                        le canal et à gauche le début de l'écluse

        Ce petit séjour londonien était mal parti avec la pagaille monstre de la Gare du nord à Paris : le matériel électronique de contrôle à la Gare du Nord ne fonctionnait pas. L'intelligence artificielle (IA), c'est beau quand ça marche. Quand ça ne fonctionne pas, c'est toujours de l'IA, mais le sigle veut plutôt dire, comme écrit mon mensuel préféré, de l'Idiotie Augmentée ! Bonjour la vie cet été à Paris avec les JO hyperconnectés...


 

 

                         

mercredi 12 juin 2024

12 juin 2024 : Françoise Hardy, la chanson du mois.

                     Parfois en voyage, je me laisse en arrière.

                  (Peter Härtling, Odeur de feu : 17 poètes d'Allemagne, trad.     Rüdiger Fischer, En forêt, 2008) 


        Françoise Hardy m'a beaucoup marqué, non seulement par ses chansons (avant Barbara, ce fut ma chanteuse préférée), mais aussi par sa féminité, par sa beauté. C'est la seule chanteuse dont j'ai eu un poster dans ma chambre d'étudiant. J'aimais sa minceur, sa distinction, sa tendresse, sa fragilité, sa séduction. Elle fut pour moi la femme idéale. 


       Je vous propose donc une chanson qui, pour moi, est le chant d'amour par excellence.

                         La question

pour l'écouter : 

https://www.google.com/search?client=firefox-b-e&q=fran

%C3%A7oise+hardy+je+ne+sais+pas+qui+tu+peux+%C3%AAtre#fpstate=ive&

vld=cid:6b402c2c,vid:zBf_PWSU1cM,st:0

 

Paroles :

Je ne sais pas qui tu peux être
Je ne sais pas qui tu espères
Je cherche toujours à te connaître
Et ton silence trouble mon silence
Je ne sais pas d'où vient le mensonge
Est-ce de ta voix qui se tait?
Les mondes où malgré moi je plonge
Sont comme un tunnel qui m'effraie
De ta distance à la mienne
On se perd bien trop souvent
Et chercher à te comprendre
C'est courir après le vent
Je ne sais pas pourquoi je reste
Dans une mer où je me noie
Je ne sais pas pourquoi je reste
Dans un air qui m'étouffera
Tu es le sang de ma blessure
Tu es le feu de ma brûlure
Tu es ma question sans réponse
Mon cri muet et mon silence...