Il revenait
des fins fonds de l’enfer
parlait de l’indécence
de vivre heureux ici
(Jean-Pierre Thuillat, Dans les ruines, L’Arrière-pays, 2014)
Après des années où je n’ai pas pratiqué (je suis allé deux fois au Temple protestant du Hâ, et une fois à l’église de la Trinité, Une fois à l'église en Côte d'Ivoire, et à Madagascar, et trois fois à la Désirade, je suis assez œcuménique), je suis allé assister au culte de L’Ehpad Marie Durand de Bordeaux, proche de chez moi. J’ai commencé la semaine dernière avec mon ami Thierry à y faire de la lecture à haute voix, à l’occasion du Printemps des poètes. Et je vais être bénévole à partir de lundi, en tant que lecteur particulier pour deux résidents, dont une dame âgée de 103 ans et aveugle. J’ai discuté avec elle après la séance de lecture, elle veut que je lui lise des romans qui lui rappelleront ses lectures de jeunesse.
Selon ce qu'elle souhaite, je commencerai par Le portrait de Dorian Gray, d’Oscar Wilde, et je me suis mis à sa relecture. Drôle d’idée que de se faire lire Oscar Wilde à 103 ans ! Mais pourquoi pas ? Moi-même, depuis que je suis à la retraite, n’ai-je pas relu des romans lus entre 11 et 17 ans ? Parfois pour la jeunesse, comme Gustave Aimard (Les Trappeurs de l’Arkansas), Marcel Aymé (Contes du chat perché), Paul-Jacques Bonzon (Delph le marin), Collodi (Pinocchio), Selma Lagerlöf (Le merveilleux voyage de Nils Holgersson), Hector Malot (Sans famille), les Contes de Perrault, Michel Tournier, Jules Verne, Michel Zévaco (6 romans de la série Les Pardaillan, écrits pour les adultes, mais que le jeune Sartre lisait à huit ans) ; d’autres pour adultes, mais que j’avais lus jeunes, comme Balzac (2 romans), Emily Brontë (les Hauts de Hurlevent), Corneille (plusieurs pièces), Dostoïevski (L’idiot), Arthur Conan Doyle, Dumas (4 romans), Howard Fast (Spartacus), André Gide (3 romans), Giono (Regain), Panaït Istrati (3 romans), Alfred Jarry (Ubu roi), Kafka (La métamorphose), André Malraux (La condition humaine), Molière (plusieurs pièces), L’abbé Prévost (Manon Lescaut), Racine (plusieurs pièces), Edmond Rostand (Cyrano de Bergerac), George Sand (2 romans), Shakespeare (plusieurs pièces), Steinbeck (2 romans), Stendhal (La chartreuse de Parme), Tolstoï (2 courts romans), Voltaire, etc.
Ce qui fait que je comprends très bien ce retour vers les lectures de jeunesse que fit sans doute "Madame Mimi" (comme elle m’a demandé de l’appeler). Je pense que, quand je serai dans l’octantaine, j’aurais encore davantage le désir de lire d’autres livres de ma jeunesse. D’après ma liste, il y a beaucoup de théâtre et de romans et nouvelles. Je relis aussi pas mal de poésie, mais rarement un recueil complet.
Et le culte d’aujourd’hui m’a décidément révélé le souhait de me replonger dans les évangiles : les textes du jour venaient de l’Évangile de Jean : l’épisode de la Samaritaine (chapitre 4, versets 7 à 15) et dans les dernières paroles pendant la Cène, la vigne et les vignerons (chapitre 15, versets 1 à 8). Le pasteur a beaucoup insisté dans son intercession sur la paix : « Seigneur, souffle un vent de paix sur notre Terre, suscite des hommes et des femmes de bonne volonté. Fais germer, auprès des dirigeants, les idées qui changent positivement la face du monde ».
Et j’ai pensé à Gaza et aux très nombreux SDF. J’ai médité sur les vers de Jean-Pierre Thuillat que je suis en train de lire (cf exergue) et ceux-ci :
On n’est plus au douzième siècle. La barbarie, c’est aujourd’hui,
À Tokyo, New York ou Paris
les sans-papier les sans-famille
hantent les rues de l’opulence.