Malheur
à qui, loin de ses parents et de ses frères et sœurs, mène une
vie solitaire, le chagrin l’empêche de profiter même du plus
grand bonheur, l’essaim de ses pensées le ramène toujours vers la
demeure de son père, là où le soleil d’or, pour la première
fois, lui ouvrit le ciel, où dans les jeux fraternels se nouaient
les liens les plus tendres et aimants.
(Johann
Wolfgang von Goethe, Iphigénie
en Tauride,
trad. Bernard Chartreux, L’Arche, 2016)
Je n'avais pas lu de pièce de Goethe depuis des décennies. je me souviens que son théâtre m'avait enthousiasmé pendant mes années lycée. Qu'on avait même joué Egmont à la télévision vers 1962 (?). Impensable aujourd'hui, où le théâtre classique (même français) est relégué aux oubliettes !
Iphigénie
en Tauride
se passe plus de
dix ans après le début de
la guerre de Troie. On
retrouve
Iphigénie, sauvée
du sacrifice à Aulis par la déesse Diane,
exilée
comme
prêtresse
de
cette même déesse dans ce lointain pays barbare,
où
elle a réussi à convaincre le roi Thoas
de
renoncer
aux sacrifices humains des
étrangers qui débarquaient sur le rivage,
sacrifices
que l’on offrait à la déesse. Le
roi Thoas, veuf et qui vient de perdre son dernier héritier, demande
à la jeune femme de l’épouser.
Elle
réserve sa réponse. Or, voilà que débarque
Oreste, accompagné
de Pylade, venus
dérober la statue de la déesse. Oreste était un tout jeune garçon
quand Iphigénie disparut soudain
à Aulis. Aussi
ne se reconnaissent-ils pas. Mais Thoas, ulcéré par le refus possible
d’Iphigénie, lui ordonne de reprendre les sacrifices en sacrifiant
les deux étrangers qui viennent de fouler le sol de Tauride.
Iphigénie, peu
encline à relancer les
sacrifices
humains,
interroge
Oreste et Pylade, et de fil en aiguille, découvre qu’Oreste est
son
frère. En
fin de compte,
Iphigénie, Oreste et Pylade
pourront quitter la
Tauride, Iphigénie
réussissant à panser par sa douceur et sa bonté l’âme revêche
du roi.
Bien
sûr, on peut voir ici, dans cette modernisation de la tragédie
d’Euripide,
le fruit du
siècle des
Lumières et de la condamnation des coutumes barbares. Oreste, qui arrive, après avoir tué sa mère
Clytemnestre (pour venger le meurtre de son père Agammemnon), n’est
qu’un jeune homme rongé par le remords, Il
est devenu presque fou, et il faudra le
tendre dévouement d’Iphigénie
pour le convaincre de renaître à la vie et de la ramener avec lui
en Grèce.
Pylade avait
conseillé
à Iphigénie de mentir au roi Thoas, pour
masquer leur fuite. Mais Iphigénie, noble âme, choisit de dire la
vérité au roi.
Thoas, bien
que rustre et sauvage, est ébloui par la persuasion de la jeune vierge,
et
les laisse
quitter la Tauride.
Cette
superbe pièce de Goethe est présentée ici dans les deux versions,
la primitive en prose, et la version finale en vers. C’est tout
bonnement merveilleux !
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