dimanche 19 août 2012

19 août 2012 : qui reste roi de ses douleurs ?


Vivre n’est plus qu’un stratagème
Le vent sait mal sécher les pleurs
Il faut haïr tout ce que j’aime
Ce que je n’ai plus donnez-leur
Je reste roi de mes douleurs
(Aragon, Richard II Quarante, 
à écouter chanté par Colette Magny, 
sur http://victorugo.blogspot.fr/search/label/Aragon%20Louis)

Après la rigolade, un peu de réflexion ! Ah ! Rester roi de ses douleurs, comme le chante Aragon dans son recueil Le crève-cœur, ce serait idéal...
La nuit a été douloureuse : 45 minutes de répit entre deux passages rapides aux W-C, pour lâcher quoi, trois misérables et terribles gouttes. Sous antibiotiques depuis hier, j'ai eu un petit répit ce matin, réussi à pisser deux fois un fond de verre. Et, la douleur persistant, je suis retourné aux urgences cet après-midi, où cette fois on m'a placé une sonde permanente, car ce n'était plus tenable, j'avais de nouveau une rétention de 0,8 l. Cette fois, on me donne l'adresse d'une clinique avec urologie, pour que je m'y rende demain en rendez-vous d'urgence. Je m'attends à casquer, car les RV urgents avec les spécialistes, ça peut coûter bonbon.
On verra, l'important est de ne plus souffrir. Le bon La Fontaine avait beau proclamer "Plutôt souffrir que mourir, c'est la devise des hommes" (La mort et le bûcheron), j'avais forte envie d'avaler des tonnes de cachets pour en finir : je ne suis pas assez courageux pour me jeter de mon huitième étage. Je me croyais dur au mal, moi qui ai supporté les douleurs de l'ulcère à l'estomac pendant douze ans, moi qui ai préféré risquer de me faire amputer du pied plutôt que de montrer mon dessous de pied dans lequel une énorme écharde de bois s'était fichée en glissant sur la parquet à treize ans, moi qui ai refusé la morphine lors de mes coliques néphrétiques, moi qui ai enduré d'autres avanies. Il est vrai que j'étais plus jeune, et un peu plus entouré.
Mais la solitude n'est pas la bonne conseillère de la douleur. On ressasse, on tourne en rond. Que faire, en effet ? La lecture ne m'apporte qu'un soulagement passager, et pourtant L'entourloupé du Québécois Yves Beauchemin est un régal qui, en d'autres temps, m'aurait fait mourir aussi, mais de rire. L'écoute de disques aussi : j'ai écouté Jean Genet parler de George Jackson hier (disque emprunté à la Médiathèque du quartier), c'était formidable, ça m'a requinqué et donné envie de lire Les frères de Soledad. Mais la nuit, c'est terriblement long quand on souffre, quand on commence à douter de soi et de sa capacité à résister au mal. Et que le sommeil reste vaguement épisodique.
Bon, y a pire que moi. Dans mon box, on a amené cet après-midi une jeune fille (20, 22 ans ?) souffrant le martyre après un séjour de trois mois en Bolivie (infection de l'estomac, infection urinaire), je l'entendais pleurer. Sa mère était là pour la réconforter. C'est beau, les voyages, ça forme la jeunesse. Je pense à Lucile, de nouveau en mission en brousse, à Mathieu sur les routes par cette canicule (de compagnie, heureusement), à tous les isolés, à tous les malades, à Igor, sidéen, que j'ai invité à m'accompagner à Venise : et pourrai-je seulement y aller ?...
Prochaines nouvelles après l'urologue.
Et avez-vous remarqué cette propension que l'on a à tomber malade le week-end ?

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