Les
yeux sont ouverts. Autour des yeux, l'espace.
L'espace
est silencieux. Trous de bruit, trous de bruit partout.
Ouverts,
dans la matière silencieuse et bruyante de l’espace.
Les
yeux voient.
(Leslie
Kaplan, L'excès-l'usine, Hachette, 1982)
Je
reviens de Poitiers. J'ai pris un train qui n'était pas le mien,
puisqu'en jour de grève, on peut monter dans n'importe quel train.
Pas de contrôle, j'aurais pu filer jusqu'à Strasbourg ! Non,
je suis sagement rentré chez moi. Mon bref séjour poitevin, m'aura
permis de rencontrer de nouveau mes amis Georges et Odile, les
poètes, Frédéric, qui m'a offert un dvd, ainsi que Cédric et Gilles, qui travaillent à la BU, et m'ont hébergé. Mardi
soir, muni d'un micro, j'ai fait mon petit récital de poésie au
Biblio-café (je me suis trouvé excellent dans une lecture de longue durée, environ 25 minutes non-stop) devant un public maigrelet, et pu aussi lui parler du voyage
en cargo.
Commentaire de l'auteur sur son site : "Mais lisez, bordel !"
Mercredi après-midi, je suis allé à la Bibliothèque des
Couronneries pour participer bénévolement avec V. à la vente de
livres pour le compte de la librairie La belle aventure, qui ne
peut en cette période détacher ses vendeuses hors de la librairie.
L'animation de Loïc Méhée, auteur-illustrateur pour les enfants, a
attiré une soixantaine de personnes, en comptant les parents
présents.
Son livre Pictoumou, le hérisson qui a les pics tout
mous (éd. Les 400 coups) a fait un tabac, nous en avons vendu
tous les exemplaires.
Et
mercredi soir, je suis allé revoir, en compagnie de Georges Bonnet,
la pièce de Jean-Claude Martin, Je n'ai jamais pris l'autobus,
jouée par mon ancienne troupe d'amateurs, la Troupe du 102.
la pièce a été publiée (éd. L'Aiguille)
Ça se
passe à un arrêt de bus, sur trois jours et trois nuits, en général
cinq tableaux par jour (matin, 10 h 40, après-midi, soir, nuit) :
des gens viennent là, se parlent ou pas, la nuit, un SDF se fait
tabasser par trois voyous cagoulés, un couple se dispute parce que
leur voiture est en panne et que l'autobus, c'est pas le pied
(surtout pour la femme), deux vieilles dames, un vieux poète (qui
fait des rimes en us, ce qui donne lieu à des vers comiques :
"Je suis un vieux poète,
presque un diplodocus / J'ai replié ma vie, j'ai rangé mon phallus
/ Seul sous la Voie lactée, j'attends mon infarctus",
par exemple), des policiers, des ambulanciers, un ado pendu à son
portable, enfin tout un monde se croise autour là... Les onze
comédiens jouent une cinquantaine de rôles. C'est assez drôle, on
reconnaît les obsessions de l'auteur : la solitude, l'amour
impossible, la hantise du vieillissement... Une jolie musique
guillerette su metteur en scène, Hervé Guérande-imbert, agrémente
une chanson que la troupe entonne en chœur (refrain : "Les bus, les bus, c'est mon dada : / Sont tout pour moi, j'en suis fada. / Jamais je n'ai couru les filles, / J'ai rompu avec ma famille. / Et le dimanche, suprême astuce, / Je le passe au... marché au bus !). Avis aux troupes de théâtre à la recherche d'un texte !
Et
puis j'ai lu le journal de Gérard Tournadre, intitulé Le
littéralecteur : au fil des jours (Books on Demand, 2013), dans lequel
l'auteur fait défiler les années 2011 et 2012. Peu de faits
politiques et sociaux, non, c'est un journal essentiellement
littéraire où l'auteur nous fait part de ses lectures. Il est
visiblement féru de Marcel Proust, de Paul Valéry, de la mythologie
grecque (long développement sur Artémis) et sumérienne
(Gilgamesh), d'Apollinaire aussi. Ici et là, il rend hommage aux
écrivains de la terre, Giono, Ramuz, et fait un bel éloge funèbre
de l'écrivain-paysan gersois (qui fut mon ami) Marius Noguès, mort en juin 2012. Rousseau aussi apparaît, ainsi
que Montaigne (son favori), Chateaubriand, Nabokov ou André Gide. Il
n'a pas de mots trop durs pour le Goncourt en 2011 de Michel Houellebecq, La
carte et le territoire (forcément, quand on sort de Proust !),
alors qu'il est enchanté par le dernier roman d'Henry Bauchau,
Boulevard périphérique. Il parle aussi de théâtre (Brecht,
le théâtre antique), de conférences (notamment celle faite par
Odile Bordaz sur le vrai D'Artagnan, où elle rend hommage à
Alexandre Dumas), sans oublier l'air du temps, ainsi pour le 24 décembre
2012, il donne un poème, dont la dernière strophe est : "Tout
à l'heure à minuit sonné / Un grand chant a été entonné / Pour
celui qui a faim / La mangeaille demain ?"
Car Gérard Tournadre est poète aussi (Fragrances de
désespéramour, précédé de Pourquoi demain ! paru
chez le même éditeur, 2013), où il traite sur un ton élégiaque
du temps qui fuit, des amours désespérées et du vieillissement.
J'ai dévoré Le littéralecteur.
Et puis, je suis rentré plein d'usage et raison...
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