Le
voyageur s'apparente au flibustier : il arrive, il voit, il
prend, il s'en va. D'ailleurs, à y regarder de plus près,
« flibustier », mot d'origine hollandaise, veut dire
exactement « libre butineur », celui qui butine
librement.
(Daniel
Herrero, Partir :
éloge de la bougeotte)
Puisque Herrero en parle, je
reviens sur la pauvreté. Effectivement, si on ne veut pas en voir, il vaut mieux ne pas sortir de chez soi ! Mais j'ai suffisamment connu ça dans ma jeunesse pour n'en être pas effrayé : ça fait partie de la vie, et quand on va vers les pays du sud, on y est forcément confronté. À
nous de ne pas étaler notre relative opulence et à se montrer simple, comme tout être humain devrait l'être ! C'est vrai, à la Jamaïque, à Kingston, à
côté de beaux immeubles, les bidonvilles couvrent des km². Pas vu de
bidonvilles à Carthagène, mais à Guayaquil, terrible, on arrive
par le bras de mer ou de rivière, et avant d'arriver au port, sur
trois bons kilomètres, ce sont des quantités de bidonvilles au bord
même de l'eau et même sur pilotis... En fait, des
cases en bois, avec toit en tôle ondulée, un peu comme il y avait
en Guadeloupe, plus ou moins délabrées, en bord de
l'eau, on se demandait comment ça tenait encore !
Guayaquil :
le cargo s'avance maintenant majestueusement dans la
rivière-baie-delta de Guayaquil.
la rivière de Guayaquil, bordée de mangrove
Temps gris, j'espère que nous
n'aurons pas la flotte. Janet nous dit que lors de ses deux
précédentes escales, il pleuvait. J'enfilerai mes gros godillots,
et s'il le faut, je mettrai ma grosse veste à capuche, car j'ai fait
la sottise d'oublier d'emporter un k-way ! Arrivée
impeccable, les deux remorqueurs nous poussant sur le quai. Tout le
long de la rive, d'impressionnants bidonvilles.
arrivée sur Guayaquil : bidonvilles au bord de l'eau
Sans doute la
première fois qu'on se sent dans le Tiers-monde. Le centre ville de
Guayaquil a l'air assez éloigné, comme d'habitude, mais ce qui nous
étonne le plus, c'est les habitations – bidonvilles à fleur d'eau
– toutes proches. On voit les gamins se baigner dans les eaux qui
ont pourtant l'air plutôt sales. Habituellement, le port est éloigné
des habitations.
Puis,
après avoir montré patte blanche aux agents portuaires, nous avons
pris un taxi : le chauffeur nous annonce 10 $ pour la course.
Chemin faisant, il nous apprend que c'est un jour férié, d'où le
peu de circulation, et nous conduit devant la cathédrale de
Guayaquil, avec mission de nous y retrouver à 17 h : mais c'est
20 $ en fin de compte et autant pour le retour ; Janet est
furax.
Guayaquil, la cathédrale
Jean et moi, plus philosophes, et déjà instruits par les
expériences de Kingston et Carthagène, faisons la part des choses :
après tout, ça fait moins de 7 $ par personne, et il faut bien que
les hommes vivent. C'est là un aspect de la lutte des classes
mâtinée de conflit Nord/Sud, il faut tondre les touristes, censés
être riches, ce qui n'est pas tout à fait notre cas, nous sommes tout
au plus aisés ; mais en tout cas, nous venons de pays riches.
Nous
nous sommes donc promenés, notamment sur le malecon (promenade le
long de la rivière)
promenade au bord de la rivière
où était ancré un merveilleux trois-mâts
école,
le trois-mâts
et où nous avons fait du shopping, Janet voulait offrir un
tee-shirt à Ben, le messman, dont c'est l'anniversaire dimanche
prochain (31 ans). J'ai participé au cadeau, finalement un polo,
assez chic. Il faisait chaud (33° relevés sur une affiche
digitale), mais en marchant sous les arcades ou sous les arbres du
malecon, près du gros bras de la rivière, c'était très
supportable. Petit arrêt (c'est incroyable comme je repère ces
établissements !) devant la Biblioteca municipal,
la bibliothèque municipale, je suis entré voir, c'était bien fermé !
que je photographie
de l'extérieur, mais qui est fermée au public ce jour.
Enfin
nous sommes allés au square jardin, juste en face, avec la statue de
Bolivar, et une quantité prodigieuse d'iguanes de toutes tailles, il
y avait même des bébés-iguanes !
un iguane se promène devant les badauds
Inutile de dire que la foule se pressait
autour d'eux, même pour les toucher, alors que c'était bien indiqué
« prohibido », le policier présent, bon enfant, laissant
faire les enfants et les badauds.
ben oui, j'aime monter aux arbres !
Ces iguanes montent aux arbres, et
il y en avait parfois sur toutes les branches de certains, ils se
confondaient avec la couleur grise des branches, et il fallait bien
observer pour les soupçonner. Très beaux arbres du voyageur.
À
part ça, Guayaquil ne présente pas beaucoup d'intérêt : là,
c'était jour férié, pour cause de Carnaval, et il aurait fallu y
rester le soir ! Et sauf très beau temps, je n'y redescendrai
pas au retour. Encore faut-il se méfier du beau temps. Comme nous
attendions sur un banc non loin du lieu de rendez-vous, Janet a
soudain, vers 16 h 15, aperçu notre guide accompagnateur du
chauffeur de taxi, Carlos – j'ai bien compris qu'il partage le gain
avec le chauffeur, c'est aussi un petit boulot. On lui a fait signe,
et bien nous en a pris, car à peine arrivé au cargo, le déluge
s'est abattu sur la ville. Carlos nous disait qu'il pleuvait tous les
jours.
déluge sur la ville et vue du port, vus du master bridge
Je le soupçonne fort d'avoir prévu la pluie et d'être passé
nous chercher par avance, sinon, nous aurions été copieusement
saucés.
À
suivre...
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