Ceux qui abandonnent une liberté essentielle pour acheter un peu de sécurité temporaire ne méritent ni liberté, ni sécurité.
(Benjamin
Franklin)
Sous
prétexte de renforcer les mesures contre le terrorisme, le
gouvernement s’apprête à inscrire
dans la loi les principales mesures d’exception de l’état
d’urgence. Rappelons
que l’état
d’urgence a été instauré par le gouvernement le 14 novembre 2015
suite à l’attentat du Bataclan, et
prorogé
systématiquement par
la suite.
Il
permet notamment
aux
préfets,
sans aucun contrôle du juge, de procéder à des perquisitions,
d’assigner à résidence (et
on ne s’en est pas privé, notamment pour des opposants écologistes
ou syndicaux),
de fermer des sites Internet, d’interdire des manifestations (là
encore, ça devient la croix et la bannière pour obtenir
l’autorisation de manifester, fût-ce le plus pacifiquement du
monde, sous prétexte de menaces à l’ordre public),
de dissoudre des associations...
L’assignation
à résidence pour toute personne "dont son comportement
constitue une menace pour la sécurité et l’ordre public" a
eu ses nombreux loupés, a fait perdre leur emploi à des dizaines
d’assignés qui ne pouvaient plus se rendre à leur boulot. Elle
ressemble bigrement aux lettres de cachet de l’ancienne royauté (il est vrai que notre république, même "en marche" y ressemble de plus en plus).
Elle n’a jamais empêché un apprenti terroriste de disparaître
dans la nature, s’il avait envie de passer à l’acte. Et on a vu
depuis que les camions et les automobiles devenaient des engins
meurtriers : va-t-on interdire la circulation routière ? Par contre, elle a permis toute opposition démocratique
(manifestation) à la COP 21 ! Il est vrai que nos écolos
décroissants sont de dangereux terroristes, des empêcheurs de
construire des centrales nucléaires, des
opposants aux ventes d’armes et aux projets pharaoniques non
seulement dispendieux et très coûteux en énergie, mais inutiles (Notre-Dame des Landes)...
Quant
aux manifestations contre la loi travail, entravées dans des nasses
policières (ce qui n'empêcha nullement les débordements, ou au contraire les explique), puis interdites, on voit où l’état d’urgence
mène : restreindre le droit d’expression, sauf celui des
merdias
tout-puissants (depuis que Dieu n'existe plus, ce sont eux qui mènent le monde... par le bout du nez), relais officiels de la propagande d’État, qui
s’en réjouissent à
longueur de colonnes et d’antennes. Ah ! On ne risque pas
d’assigner à résidence les sieurs Zemmour et Hanouna, malgré les
tombereaux d’insanités et de bêtises qu’ils déversent à
longueur d’écrans !
Bien
entendu, la casse annoncée du code du travail va s’accompagner, très
probablement, d’une interdiction de
manifester contre la future
loi au nom du risque de
trouble à l’ordre public. Il
paraît même que dans le
projet de loi, l’article L228-4 indique que « le ministre de
l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la
République de Paris faire obligation à toute (personne ciblée par
l’autorité administrative) de déclarer ses identifiants de tout
moyen de communication électronique dont elle dispose ou qu’elle
utilise, ainsi que tout changement d’identifiant ou tout nouvel
identifiant ». La France, patrie des droits de
l’homme (qui ne
l’étaient pas pour tous, les migrants en savent quelque chose)
va devenir la patrie des non droits de l’homme. Big Brother va
pouvoir nous
suivre
à la trace...
L’Union
Syndicale des Magistrats s’est
fendue d’un
communiqué de presse dans lequel elle dénonce la mise en place d’un
"État policier". Elle conclut
que : "dans un État démocratique, sortir de l’état
d’urgence ne signifie pas introduire dans le droit commun des
mesures d’exceptions et exclure le contrôle de l’autorité
judiciaire".
La Ligue des Droits de l’Homme, s’en
est émue aussi. Car
désormais chacun
pourra être victime de cet arbitraire, d'ailleurs certaines
des dispositions inscrites dans l’état d’urgence sont
déjà utilisées
contre des militants associatifs, syndicaux ou politiques.
On
ne peut que s’étonner de l’apathie
générale des Français devant ces mesures liberticides. Il
est vrai que dans l’ère
de l’atomisation individuelle et
du chacun pour soi, la plupart des sujets (citoyens ?) doivent
se dire
que cela ne les concerne pas et ne les concernera jamais. L’égoïsme
de chacun est aujourd’hui devenu officiellement l’un des
principaux piliers de la
démocratie et de son
déclin.
D’ailleurs,
le 21 décembre 2016, à
l’occasion d’une nouvelle
prolongation de l’état d’urgence, la France a écrit au Conseil
de l’Europe pour le prévenir qu’elle allait continuer à violer
la Convention Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) en raison de la
"persistance de la menace terroriste". Avec l’Ukraine et
la Turquie (on a les
amis démocrates qu’on peut !),
la France est le troisième pays qui déroge ainsi à la CEDH. Comme
dans ces deux pays, on pourra donc être privé de liberté pour
peu qu’on ne la ferme pas suffisamment. C’est
peut-être là la victoire définitive des terroristes : en
voulant les contrôler (on n’y arrive pas) et les combattre (à
coups de bombardements qui cause nettement plus de morts civils, mais
on nous a fait admettre les dégâts collatéraux et qu'on ne fait pas la guerre sans casser des œufs), on accepte le
saccage de nos libertés fondamentales.
Il
ne nous reste plus qu’à reconstruire la Bastille : tiens,
voilà un projet pharaonique qui pourrait être utile ! Je me demande pourquoi on n'y a pas encore pensé, en haut lieu ?
(largement inspiré d'un texte de Philippe Alain, dont j'emprunte de larges extraits et que je remercie)
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