Un
jour, vous aussi vous mourrez. Quand viendra l’heure, posez-vous la
question qui compte : « Ai-je fait un bel usage de ma
présence au monde ? »
(Lyonel
Trouillot, La
belle amour humaine,
Actes sud, 2011)
Dans
le train il y a quelque temps. Je reviens des toilettes, j’ai dû
m’absenter une minute ! Quand je reviens, je vois un type qui
regarde avec suspicion ma sacoche, posée sur mon siège, à côté
de mon livre. Il a déjà son smartphone à la main,
"Elle
vous déplaît, ma sacoche ?
— Non,
mais vous ne l’avez pas étiquetée ! J’allais appeler
le contrôleur.
— Mon
sac à dos, là-haut, l’est [je lui montre]. Pourtant, il est bien
plus gros qu’elle, où je ne mets qu’une petite bouteille pour le
voyage, mon livre et mon carnet de voyage. Et, lui, pourrait contenir
une bombe ! Vous croyez que l’étiquette fait le contenu,
comme l’habit fait le moine ?
— Mais
pourquoi vous la laissez là ?
— Parce
que je suis sûr de l’y retrouver. Si je vais avec aux toilettes, y
a une chance sur deux que je le pose et l’oublie... À mon âge,
vous savez, la mémoire...
— Mais
les panneaux indiquent que tous les sacs doivent être étiquetés.
— Sortez
un peu, mon vieux ! Promenez-vous dans le train, les 3/4 des
sacoches d’ordinateur n’ont pas d’étiquette non plus, ni
les
sacs à main de dame ; disons que c’est mon sac à main, cette
sacoche ! Faut pas être parano, tout de même, et arrêter de voir des
bombes et des terroristes partout..."
Ça
s’est arrêté là, l’homme jeune (la trentaine), a rejoint son
siège, il n’en pensait pas moins ! Depuis, je prends ma
sacoche en bandoulière quand je me déplace dans les trains... Mais
je n’en pense pas moins non plus !
la fameuse sacoche litigieuse
* *
Ça
me rappelle l’hôtel Ibis de Saint-Pétersbourg : la première
chose qu’on voit dans le hall, c’est un grand panneau, en
plusieurs langues : ATTENTION AUX PICKPOCKETS, DANS LES RUES,
LES MAGASINS, LES MUSÉES, LE MÉTRO. Résultat, je n’ai pas osé m’aventurer
dans le métro pendant mon séjour pétersbourgeois. Drôle d’accueil
quand même !
j'ai dû me contenter de me balader dans les rues, le long des rivières et des canaux
* *
Dimanche
matin, SMS d’une de mes sœurs : « T’as des nouvelles
de Lucile [ma
fille vit à Londres depuis novembre dernier] ?
Paraît qu’y a des Français parmi les morts ! » Ma
réponse, en SMS : « Tu regardes trop la télé ! »
J’étais
parti voir Michel à vélo dans sa maison de convalescence. Le soir,
avant le match de rugby, on regarde les infos : les charognards
sont là, ils interrogent les rescapés avec une gourmandise
malsaine, on a l’impression qu’ils regrettent que ça n’ait pas
été plus sanglant ! Plus de la moitié du journal y fut
consacrée... Comme je fais bien de ne pas regarder la télé, sauf
quand je suis chez les autres !
Retour
du bassin d’Arcachon aujourd’hui : à Midi et demi, je suis
à peine à Saint-Médard-en-Jalles, encore à 20 km de chez moi.
Trois heures de vélo, même sur du plat, je suis claqué. j’avais
oublié qu’on était lundi de Pentecôte, la plupart des restos
sont fermés, une dame (sans écouteurs aux oreilles) que
j’interroge, me signale le Meuh,
consacré au bœuf, tout près de l’Intermarché, qui est ouvert toute l'année. Ça me fait un
détour, mais tant pis !
la sac du panier
Je fais un test, pour voir si la parano
a atteint tout le monde. J’installe
mon vélo en face, au parc à vélo, mais laisse exprès mon sac (qui
contient surtout le linge sale de mon frère) dans le panier arrière,
je passe ma commande et je m’installe juste en face, en terrasse,
pour observer le manège des gens qui vont passer à côté du vélo.
Tout en mangeant, je suis aux premières loges pour intervenir et
dire que ce sont mes affaires. Les deux cyclistes qui s’étaient
garées avant moi reprennent leur vélo, jettent vaguement un regard
sur mon panier et s’en vont. La voiture la plus proche, ce sont
trois ouvriers d’une entreprise de charpente, ils ont mangé au
restaurant, ils passent à côté du vélo, sans un regard,
s’installent dans leur véhicule de service et démarrent. Une
autre conductrice prend sa voiture juste à côté et s’en va. Mon
vélo ne l’a pas surprise. Test concluant : tous les Français
ne sont pas paranos, ça me rassure !
* *
Enfin,
je voudrais revenir sur le terme terroriste, de plus en plus galvaudé
aujourd’hui. Je rappelle simplement qu’il a eu ses lettres de
noblesse : les résistants aux nazis et aux régimes
collaborationnistes étaient traités de "terroristes". Ce sont des
policiers français qui ont arrêté le cousin de ma mère qui
n’avait pas encore dix-huit ans et l’ont livré aux Allemands
comme "terroriste", il n’est jamais revenu des camps !
Appelons
donc nos terroristes actuels par leurs vrais noms : des
fanatiques religieux, des fous de Dieu, des suicidaires, des
assassins, des criminels, des tueurs, des meurtriers, je vous laisse
en imaginer d’autres ! Car eux ne s'opposent pas à une
oppression réelle, ils vivent dans le fantasme et dans la
manipulation.
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