Il y a dans cette profusion inutile un arrière-goût de mystification.
(Simone de Beauvoir, L’Amérique au jour le jour, Gallimard, 1948)
Bon, une semaine passée depuis mon retour. J’ai repris mes marques ici, mais je n’oublie pas de donner mes dernières impressions de Venise.
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Marco Zennaro, ancien rugbyman, détenu au Soudan
Cette année 2021, je suis davantage resté dans le centre de Venise, n’ayant eu que peu à me déplacer pour aller voir mes films ; en effet je n’ai même pas mis les pieds au Lido, où se font toutes les projections officielles de la Mostra, ce qui prend un minimum de 1 heure et quart à l’aller et au retour (vaporetto + marche à pied Hôtel-quai de départ + marche à pied ou bus au Lido). J’ai pu ainsi observer à quel point Venise est une cité faite pour les touristes et pour le consumérisme : discutant avec des marchands, ils m’ont confirmé que l’absence des touristes venant des USA, de Chine, du Japon, de Russie et des émirats entraînerait une baisse significatives de leur chiffre d’affaires. Que de magasins de luxe dans les artères principales, ou de babioles made in China dans les kiosques ou petites boutiques de souvenir, que de restaurants.
J’y faisais fort peu attention autrefois, marchant à grand pas pour aller prendre le vaporetto ou pour rentrer à l’hôtel, sans regarder les vitrines ! Je présume qu’ils gagnent quand même leur vie, avec les touristes européens (surtout allemands et autrichiens) et italiens, ces derniers étant très nombreux, puisqu’ils n’avaient que peu de possibilités pour partir en vacances à l’étranger. Certains Italiens m’ont dit qu’ils venaient pour la première fois visiter Venise, pourtant un fleuron de leur patrimoine ! Et certains couples venaient parfois avec leurs jeunes enfants âgés de deux ou trois ans, alors que la ville (nombreux escaliers, délicats pour les poussettes, canaux sans protection) me semble bien dangereuse pour de tels visiteurs. Quelques-uns avaient prévu le coup et tenaient leurs chérubins avec une laisse et un harnais, comme nous l’avions fait pour Lucile petite quand nous la promenions en ville ! D’autres, qui n’avaient pas d’enfants, promenaient leurs chiens : je n’en avais jamais vu autant à Venise. C’était peut-être de Vénitiens qui, s’ennuyant pendant le confinement, avaient acquis un animal de compagnie.
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derrière l'Arsenal, des religieuses
J’ai donc beaucoup arpenté les quartiers du Dorsoduro, juste de l’autre côté du Pont de l’Accademia ( pour la restauration, l’apéritif dînatoire et l’opéra de Purcell, et prendre le vaporetto qui nous a conduits à San Giorgio)), du Rialto (pour aller au cinéma Rossini ou pour me balader, manger au restaurant), du Cannaregio, de Castello et des Giardini, principalement pour visiter la Biennal d’architecture. Enfin, bref, j’ai bien arpenté la ville et, me connaissant, j’ai évité de piétiner dans les musées et dans les Fondations de plusieurs milliardaires, redoutant de piétiner. À ce sujet, il y fort peu de bancs à Venise, ce qui oblige à s’asseoir à des terrasses de café ou à l’intérieur, si l’on veut se reposer.
l'apéritif dînatoire
On est allés à l’île de San Giorgio, où je n’étais pas retourné depuis le voyage de 2002 avec Claire. Je suis monté au sommet du Campanile de l’église, d’où j’ai pu avoir une vue panoramique de Venise et de ses îles (on y monte par un ascenseur). J’ai visité aussi pour la première fois l’île de San Michele, qui abrite le Cimetière de Venise. Il y a bien quelques tombes traditionnelles, mais la plupart des tiroirs funèbres (des grands contenant les cercueils ou des petits contenant des urnes funéraires) sont dans des parallélépipèdes rectangles d’environ 30 mètres de long sur 10 de haut et 6 ou 7 de profondeur. Alors, évidemment, on a l’impression de se promener dans une cité HLM miniature, où il est très difficile de méditer, de se recueillir et de penser à ses morts. Il y avait assez peu de visiteurs, et la plupart comme moi, étaient déçus, m’a-t-il semblé.
le cimetière
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Du fait de ne pas aller au Lido, où en général, les autres années, je ne faisais que croiser épisodiquement les autres membres du groupe, j’ai pu passer quelques journées un peu en compagnie, soit pour aller voir des films au cinéma Rossini, soit pour être plus souvent avec eux (elles surtout, puisqu’on était si peu d’hommes) à aller au restaurant, soit même pour visiter la Biennale d’architecture ou me promener. Alors qu’habituellement, je suis seul pour l’art contemporain. La Biennale fera l’objet de ma dernière évocation dans les prochains jours.
l'île de Giudecca vue du sommet du campanile de San Giorgio
À suivre...
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