Plus
on vieillit, plus on sent que savoir jouir du moment présent est un
don précieux, comparable à un état de grâce.
(Marie
Curie, Lettre
à sa fille Irène,
1928, cité par Rosa Montero, L’idée
ridicule de ne plus jamais te revoir,
trad. Myriam Chirousse, Métailié, 2015)
les racines (?) phénoménales autour d'un tronc d'arbre
Il
me reste à parler de mon séjour en Guadeloupe, après le départ de
mes enfants, séjour
qui
a duré du 8 février au 7 mars, pendant lesquels j’ai logé deux
nuits à Pointe-à-Pitre à l’hôtel Saint-John (8 février et 6
mars), deux nuits à l’hôtel de Rocroy (29 février et 1er
mars), au bord de notre plage la plus usuelle, à Claire et moi
pendant notre séjour là-bas de 1981 à 1984. Le reste du temps,
j’étais chez mes amis Bourseau, sur les hauteurs de Baillif, où
je me suis efforcé de ne pas trop les embêter. Donc balades à pied
dans la montagne alentour, où
il m’arrivait de rencontrer vers 17 h des ouvriers agricoles
haïtiens que je saluais d’un « Ça va ? ».
Balades
à
Basse-Terre, le chef-lieu, que
j’ai sillonné de long en large avec une jolie promenade le long du
front de mer jusqu’à la marina, à 2 km, une visite à la
Médiathèque Caraïbe (MECA), mon ancienne bibliothèque.
Et
plusieurs vendredis après-midi
à Baillif, les jours de marché, où Mathilde et Frédéric posaient
leur étal de fruits et légumes comme chaque semaine. J’ai aussi
pas mal pris le bus.
au centre de Pointe-à-Pitre, la statue d'un joueur de gwo-ka surnommé "Vélo"
J’ai
revu Patricia N. à plusieurs reprises à Pointe-à-Pitre (elle
habite en face du Musée Saint-John Perse) et
à Baillif, où Michèle Bourseau l’avait invitée le week-end du
22 février ; Patricia débuta à la Bibliothèque en 1982, à
l’annexe de Marie-Galante, où nous partîmes une fois, Yvon et
moi, assurer un stage de formation pour les employés de bibliothèque
de cette île, et
dormîmes chez elle.
Patricia, qui travaille désormais à l’annexe de la Bibliothèque
départementale de prêt de Pointe-à-Pitre, doit partir à la
retraite à la fin de cette année.
les arbres légèrement tordus par le vent
J’ai
revu également, mais
à Trois-Rivières,
Gilbert L.,
le comédien qui avait monté un spectacle de marionnettes avec
celles fabriquées et habillées par Claire en 1983 ou 4 ; ils
avaient conçu en commun
histoire et dialogues et firent ensemble les manipulations et les
voix des personnages. Le spectacle fut donné à la Bibliothèque
départementale et à la Librairie
principale du centre ville de Basse-Terre. Claire en était très
fière. J’avais rencontre Gilbert lors d’un jogging sur les
pentes du volcan, nous avions sympathisé, je l’avais invité à la
maison, et quand il a vu les marionnettes de Claire, il a été
séduit et lui avait proposé d’en fabriquer quelques autres et
d’en faire quelque chose. Qui sait ? Si nous étions restés
là-bas, Claire se serait peut-être reconvertie dans les arts du
spectacle plutôt que dans les bibliothèques. En
effet, par
la suite d’ailleurs, à Amiens, elle avait construit un petit
théâtre (style kamishibaï) et avait fait un spectacle de théâtre
d’ombres qui fut donné dans des jardins d’enfants. Gilbert, lui,
est resté comédien-conteur-chanteur : il a une très belle
voix, et dirige une compagnie de théâtre. Parallèlement, il
prépare à l’UQAM de Montréal une thèse sur l’apprentissage du
théâtre. Il y
a
trois ans, il a fait une résidence d’artiste
d’un an en Corée du sud, d’où il est revenu avec un spectacle
avec comédiens et danseurs coréens et antillais, de très grande
qualité, m’a-t-on dit. J'étais très heureux de le revoir.
un jour de brume de sable, le ciel et la mer se marient
Mais,
en dehors de mes périodes de solitude, j’ai vécu pas mal avec la
famille Bourseau. Frédéric (qui a en outre un emploi de bureau,
l’agriculture seule ne nourrissant pas une famille) et Mathilde
produisent des légumes (christophine, roquette, etc.) et racines
comestibles (madère...), des épices (curcuma, gingembre) et des
fruits (papayes...) vendus au marché. Ils ont élevé trois enfants,
dont la dernière a eu le bac l’an dernier. Michèle, la
grand-mère, avait fait venir son frère et sa belle-sœur, avec qui
elle a passé une semaine à Saint-François, deux nuits à la
Désirade où ils avaient emmené les deux jeunes, Gallim et Sarah,
puis ils sont partis deux autres semaines à la Martinique, où
habite la sœur de Frédéric. Je l’ai donc assez peu vue, mais
elle a pu apercevoir Mathieu et Lucile.
le carnaval de nuit
Avec
Michèle, nous sommes allés ensemble au Carnaval, le lundi soir 24
février : c’était pour
voir de nuit les chars suivis des groupes de danseurs et musiciens.
Dans mon journal : "Ce
qui me surprend, c’est que tout les costumes sont pailletés de
petites lumières clignotantes : robes, ailes, chapeaux et
diadèmes, ce qui rend tous les groupes un peu semblables, et le tout
n’a rien à voir avec avec le carnaval que j’avais vu en 2010, où
chaque groupe rivalisait d’ingéniosité en matière de couture et
de choix des tissus. [...] Autre constatation : l’obésité
qui gagne une partie de la population, [...] là, 70 % des
danseuses, si peu vêtues, dévoilaient des cuisses hypertrophiées,
un popotin énorme, bref un symptôme de la mal-bouffe sévissant
ici. [...] Je me demande si, en France métropolitaines, on
laisserait ces dames ou demoiselles (car il y a des jeunes parmi
elles) être acceptées dans des groupes de majorettes ou de danses
de ce type".
Ensuite, j’ai retrouvé Frédéric et sa famille chez des amis à
eux fort sympathiques (et on
picolait sec !), d’où j’ai pu voir de
leur balcon
la fin du défilé dans la rue du centre ville.
le bagad karukera de Baie-Mahault : celtes en Guadeloupe
Nous
y sommes retournés (sans Frédéric et sa famille) le mardi
après-midi 25 février pour voir le défilé plus complet du
mardi gras
avec l’ensemble des groupes : "autre
vision du Carnaval qui durait jusqu’à minuit et peut-être plus,
car de nombreux groupes se présentaient dans des tenues très
différentes d’hier au soir. Parmi eux, un surprenant groupe
breton, bagad de Baie-Mahault avec cornemuses et un Écossais dans le
groupe ! Plusieurs portaient le kilt malgré la chaleur !!!
Je me suis baladé en remontant les groupes vers le point de départ.
Puis après avoir avisé Michèle par téléphone qu’elle pourrait
me joindre quand ils décideraient de rentrer, je suis
allé à pied jusqu’à leur
voiture, fait une sieste dans l’herbe. Et j’ai observé de
l’extérieur le Jardin botanique, fermé puisque la journée est
fériée.
un groupe mené par des hommes
D’autres
rencontres aussi, soit chez Frédéric avec quelques-uns de leurs
amis, soit chez les amis eu-mêmes, notamment un
couple que j’avais déjà vu lors de mon séjour de 2017 : la
dimanche 16 février, vers dix-sept heures, Frédéric et Mathilde
m’ont
emmené
à
Vieux-Habitants, la commune au nord de Baillif, invités à un apéro
chez Alfredo le musicien brésilien et sa compagne Solange, Française
et infirmière libérale qui a beaucoup bourlingué. Ayant atteint la
soixantaine, ils ont mis en vente leur maison, en bois, très belle,
et envisagent de rentrer en France, où ? Dans les Landes.
Alfredo avait préparé des beignets de manioc à la brésilienne :
très bon. Un bol de cerises-pays était la petite douceur.
Excellente soirée très arrosée, comme il se doit en Guadeloupe…
bel immeuble à Basse-Terre
Et,
presque tous les soirs, j’avais l’enchantement du coucher de
soleil dans la mer que je pouvais voir de mon balcon, avant de
descendre dîner chez Frédéric ou de manger chez moi. Marrant,
cette manière que j’ai de dire « chez moi » quand je
suis ailleurs. Est-ce mon habitude de voyager beaucoup qui me fait
m’installer à chaque fois dans un chez
moi
nouveau ? Il faut dire que là, c’est la troisième fois,
après 2010 et 2017 que j’occupe le même petit appartement
au-dessus de la maison Bourseau. Yvon me manquait, mais cette famille
est tellement chaleureuse qu'elle m'a fait oublier son absence et que je m’y suis trouvé bien une fois de
plus. Un grand merci à tous. Le dernier soir, je les ai invités à
manger dans un restaurant de leur choix : ce fut Le
guet-apens
sur les hauteurs de Matouba, côté Baillif. Belle soirée finale. Le
lendemain, Mathilde vint me déposer à la gare routière de
Basse-Terre où je pris le bus pour une dernière nuit à l’Hôtel
Saint-John de Pointe-à-Pitre.
la belle promenade de bord de mer à Basse-Terre
Retournerai-je
en Guadeloupe ? Mystère...
tout près de la maison des Bourseau, un cocotier cassé en deux par un cyclone
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