Elle se reprit, soudain gênée :
‒ Vieux.. Enfin, je veux dire, d’un certain âge… Et jeune d’esprit !
Elle cherchait à se rattraper, mais Giuseppe l’interrompit :
‒ Je vous en prie, pas ce genre de cliché ! Je suis bel et bien vieux de corps et d’esprit ! L’idée que tout le monde est jeune est une connerie !
(Benoît Duteurtre, Dénoncez-vous les uns les autres, Fayard, 2022)
Que ça fait plaisir de lire ça au pays du jeunisme envahissant, au moment où l’adjectif "vieux" est devenu un gros mot, et de voir que dans certains pays, les traditions sont encore honorées. Ainsi, dans les deux films que j’ai vu récemment, l’un venant du Bhoutan (L’école du bout du monde), l’autre de Bolivie (Utama, la terre oubliée).
Dans ce dernier, on voit un couple d’éleveurs de lamas octogénaires victimes de la sécheresse et de l’isolement dus au grand âge. Sisa, la vieille femme s’active pour aller chercher de l’eau de plus en plus loin, et son mari Virginio emmène les lamas brouter dans les montagnes le peu d’herbe qui y reste. Tous deux refusent obstinément de quitter ce milieu rude et de partir dans la sécurité relative des villes. Quand leur petit-fils Clever débarque, le contact va se faire difficilement, mais sous la rudesse taiseuse des anciens, la tendresse va se manifester. Ce film bolivien est un magnifique hymne à l’humanité et à l’amour humain.
Dans le film du Bhoutan, un jeune instituteur, vaguement musicien et qui ne croit pas à sa vocation de pédagogue, est envoyé dans un village perdu à plus de 3000 m d’altitude sans confort moderne, accessible seulement par des sentiers et le franchissement d’un col à 5000 m. Pas d’électricité ou si peu, et Ugyen ne pourra guère faire usage de son smartphone. Par contre, il va découvrir des enfants avides d’apprendre et une communauté villageoise accueillante, pleine d’écoute et de de reconnaissance. C’est là aussi un hymne à l’humanité et à l’amour entre tous les humains et même les animaux dans ce pays d’éleveurs de yaks. Un film tonique et qui fait du bien !
Et j’ai revu aussi à Pessac sur grand écran, cinquante-cinq ans après ma première vision, Les demoiselles de Rochefort, le film enchanté de Jacques Demy avec la musique de Michel Legrand. Je sais que beaucoup de gens n’aiment pas ce film, même parmi ceux qui aiment la comédie musicale américaine. Mais j’ai gardé le souvenir ébloui de ma première vision, en mai 1967, dans un cinéma permanent (dans ces cinémas, le même film pouvait être présenté aux spectateurs de 10 h du matin ou midi jusqu’à minuit. On pouvait reste dans la salle pour revoir le film sans payer en plus, et j’étais resté le voir deux fois de suite. Et, en sortant, sous un soleil agréable, j’avais envie de chanter et de danser comme les protagonistes du film). Depuis, dès qu’il est programmé dans une salle proche de chez moi, je fonce le voir ; seuls quelques films ont ce privilège (La strada - 2001, l’odyssée de l’espace - Les enfants du paradis - Chantons sous la pluie – Les raisins de la colère, par exemple), et j’ai parfois fait 60 km pour aller les voir, notamment d’Auch à Lectoure en 1974 pour La strada, d’Auch à Toulouse en 1976 pour 2001, l’odyssée de l’espace, de Poitiers à Montmorillon en 2011 pour Les demoiselles de Rochefort.
Vive le cinéma et les joies qu’il procure !
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