mercredi 29 juillet 2020

29 juillet 2020 : l'oppression numérique


Ce système est plus oppressif, plus écrasant, plus menaçant que jamais.

(François Maspero, Préface de Textes des prisonniers de la Fraction armée rouge et dernières lettres d’Ulrike Meinhof, Maspero, 1977)



Je viens de passer une heure avec une dame pour tenter de trouver une attestation d’emploi pour un emploi temporaire qu’elle a eu l’été 2018 comme aide à domicile (une vieille dame qui n’a pas internet) payé par CESU. Impossible ! Nous sommes allés sur le site du CESU et impossible d’accéder à cette attestation : or, elle en a besoin pour son nouveau dossier à Pôle emploi. Je me suis dit qu’on devrait trouver le formulaire d’emploi sur internet (une demi-heure d’essais, introuvable) et j’apprends que ce formulaire dépend de Pôle emploi. Sur le site de Pôle emploi, aucune trace de ce formulaire accessible. Renseignement téléphonique pris auprès de CESU (elle a téléphoné de son smartphone, bonjour la note téléphonique, c’est un 08), c’est bien Pôle emploi qui délivre ce formulaire. Encore faut-il y aller : car apparemment, c’est l’employeur qui doit le remplir et surtout le signer. Bien sûr, la vieille dame ne peut se déplacer, n’a pas internet. J’ai dit à Samira d’y aller, mais le lui donnera-t-on ?

C’est effarant que de plus en plus de documents ne sont désormais accessibles qu’en ligne. Et difficilement ! Je plains tous les ordiphobes (si, si, ils existent, et malgré l’usage fréquent que j’en fais , je suis en train de le devenir), tant internet est bouffeur de temps, addictif, et encore trop souvent, on ne trouve pas ce qu’on veut. Surtout quand il s’agit de l’administration. Sans doute pour décourager les demandeurs d’emploi, éviter qu’ils ne nous coûtent un "pognon de dingues" et surtout les pousser à faire du sport en "traversant la rue" pour trouver un emploi (dixit le Président qui, parfois et même souvent, ainsi que ses ministres, ferait mieux de se taire).



Nous sommes entrés, avec l’ère numérique dans l’antihumanisme que dénonce Éric Sadin dans L’intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle (L’échappée, 2018). Ce pouvoir numérique m’oppresse de plus en plus, et je ne dois pas être le seul. Mais il plaît à beaucoup, si j’en crois les usagers innombrables d’ordiphone.



Heureusement, pour y échapper, il reste la lecture (je viens de lire un beau roman d’aventures historique, se passant au XIVème siècle pendant la Guerre de cent ans, qui débute et finit en Angleterre, en passant par la France et la bataille de Crècy, Venise où la peste noire arrive d’Orient, et la papauté d’Avignon : Ève la rouge, de Henry Rider Haggard), les promenades dans Bordeaux et le cinéma : je viens de voir La communion, surprenant film polonais qui décrit l’itinéraire d’un jeune homme sortant d’un centre de détention pour mineurs et se métamorphosant en prêtre détonant et une reprise, Les fleurs de Shanghai (1995) qui décrit les maisons de prostitution de la fin du XIXème siècle en Chine, dépaysement garanti.




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