jeudi 2 mai 2019

2 mai 2019 : retour de manif 1



dès que les oligarchies en place cessent de trembler devant les masses en colère, elles se hâtent de récupérer par le vote parlementaire ce qu’elles ont dû céder sous la pression des luttes et de « la rue ».
(Alain Accardo, La décroissance N° 157, mars 2019)


J’étais hier, à la manif du 1er mai de Bordeaux : du monde, beaucoup de gilets jaunes, sans pouvoir déterminer d’ailleurs si tous étaient gilets jaunes du mouvement, car certains cégétistes et autres avaient également enfilé un gilet jaune, et je regrettai de pas en avoir fait autant. Enfin, pas tant que ça, car arrivé au croisement du Cours d’Albret et du Cours du Maréchal Juin, alors que je me dirigeais vers le lieu de rassemblement, nous fûmes suffoqués par la forte présence policière, armes aux poings, qui bloquait la rue qui mène vers la cathédrale et se livrait, semble-t-il, à des arrestations préventives. Par la suite, si le cortège n’a pas été menacé par les forces de l’ordre, on a bien vu que toutes les issues étaient bouchées, dès lors qu’on aurait eu tendance à vouloir s’écarter du trajet prévu. Ça rigolait pas, chez les robocops ! Malgré tout, le cortège s’est scindé en deux au croisement du Cours Pasteur et du Cours Cours Victor Hugo, un groupe, largement dominé par les gilets jaunes continuant vers les quais, les "officiels" continuant vers la Place de la Victoire.
Je suis parti vers les quais, l’atmosphère était bon enfant, et ça m’a permis d’entamer la conversation avec de nombreux gilets jaunes, de voir que ce ne sont pas ces tigres assoiffés de destruction, comme le soulignent à longueur de tribunes presse et télévision (appartenant presque tous aux grandes fortunes de France, ne l’oublions pas), mais des gens qui ont beaucoup appris depuis le mois de novembre, qui réfléchissent, à leur manière qui ne me semble pas pire que celle du gouvernement ; car lui non seulement réprime avec une sauvagerie inouïe, mais manipule l’opinion et se livre à des provocations grossières et des manipulations à peine croyables, comme celle de l’hôpital parisien, soi-disant attaqué par une horde de manifestants, histoire de faire peur aux téléspectateurs. Heureusement qu’internet nous livre des témoignages différents, parce que s’il fallait ne compter que sur BFM et consorts...
Je vous en livre quelques-uns, corroborés par des vidéos :

« Un témoin raconte : « J’ai vu ces manifestants à l’entrée de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière qui voulaient se réfugier parce qu’une colonne de CRS arrivait par le haut du boulevard [...] puis la commissaire a repéré ces gens à l’entrée, elle ordonne à ses policiers de rentrer et de les dégager. »
Un médic confirme : « Je suis street medic, j’y étais à ce moment-là. Beaucoup de gens se sont réfugiés dans l’enceinte de l’hôpital pour fuir un gazage de masse et une charge de CRS qui a eu lieu dans l’allée de l’hôpital. »
Sur facebook, une manifestante, Naty Ta, explique en détail : « Oui, il a été demandé aux vigiles d’ouvrir la grille pour qu’on puisse s’abriter des canons d’eau et des gaz. Ils n’ont pas voulu nous ouvrir, on était fait comme des rats. Les gars qui ont forcé la chaîne […] ont permis que l’on puisse s’abriter. Y’avait rien de notre côté juste nous quelques retraités, quelques jeunes NON cagoulés. 10 minutes après, les CRS sont rentrés dans l’enceinte de l’hôpital pour nous gazer et nous matraquer... à l’intérieur de l’hôpital ! Je me suis bien fait traiter de « salope, dégage » par un CRS. Pour quelle raison ? Parce que on s’est juste ABRITÉS des gaz. En tout cas, merci aux infirmiers de nous avoir aidés avec les gouttes pour les yeux ! »
Un quatrième témoignage corrobore : « un groupe de manifestants poursuivis par une brigade à moto se réfugient dans la Pitié. Ils ont pénétré dans le bâtiment mais jamais dans la réa. »

Tous ces mensonges gouvernementaux et médiatiques ne m’étonnent pas. Dans le cortège de Bordeaux, il y avait pas mal de Turcs opposés à Erdogan. Je les interroge, réponse unanime : "La France ressemble de plus en plus à la Turquie" ! Il y avait des Chiliens aussi, je leur parle, réponse : "On se croirait sous Pinochet" ! Il y avait aussi pas mal de petits retraités, des assmats (assistantes maternelles), des jeunes (et vieux) pour le climat, un SDF gilet jaune (écrit dessus « citoyen non esclave ») avec ses deux chiens eux aussi affublés de gilets jaunes (il m’apprend entre autres choses qu’il faut avoir une adresse pour toucher le RSA, ce fameux "pognon de dingue" qui traumatise tant Macron ; avoir une adresse est très facile quand on vit dans la rue, il est vrai qu’en la traversant, on trouve du travail), des gens en fauteuil roulant, d’autres poussant leur vélo, des vieux, des gamins, des Français, des étrangers, bref un brassage superbe qui m’a réconcilié avec l’humanité, la vraie. Parce que l’autre, celle qui nous regarde du haut de sa grandeur et de son arrogance, me rend de plus en plus misanthrope.

Tiens, pour terminer, et compléter ma page sur l’Europe, la couverture du Siné mensuel de ce mois :

et aussi, quelques-uns des slogans écrits sur des gilets jaunes et bien sentis (j’avais pas pris mon appareil de photo, de peur d’être agressé par la police si je les avais par mégarde dans le viseur, c’est qu’en plus ils sont susceptibles !) : 
 
« il n’y a pas de violences policières, ça crève les yeux ! »
« Le jour où la connerie est tombée du ciel, Macron n’avait pas de parapluie, et Castaner non plus »
« Bienvenue en Macronie, le pays où l’on tire plus vite que son ombre »

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