Je
hais les touristes. Dès qu’il met les pieds à l’étranger,
l’homme devient insolent et barbare.
(Georges
Simenon, Il
y a encore des noisetiers,
Presses de la Cité, 1969)
Panaït Istrati
À
peine revenu d’un formidable voyage en Roumanie, j’ai foncé voir mes
vieux amis : Georges (bientôt cent ans, qui s’affaiblit beaucoup) et Odile (qui
s’apprête à entrer prochainement en maison de retraite et qui
apprécie mon aide pour s’y préparer, car elle redoute le choc) à
Poitiers, d’où je reviens présentement, et Huguette qui, elle,
est entrée aussi en maison de retraite tout près de chez moi, et
que j’ai trouvée radieuse : sans doute le fait de n’être
plus totalement seule, notamment pour les repas de midi et du soir.
Ce qui explique que je n’ai point encore fait un compte rendu méticuleux
de ce voyage sur les pas de Panaït Istrati.
la campagne roumaine
coucher de soleil : le Danube à à Sulina
Ce
n’était donc pas à proprement parler un voyage touristique, même
si nous avons visité le Palais Cotroceni,
édifié à la fin du XIXème à Bucarest pour le roi Carol Ier, et
devenu résidence du président de la république et musée, le
monastère Cocos dans la Dobroudja (visite agrémentée d’un admirable chant de
deux moines chantres), le Monument paléo-chrétien de
Niculitel (sous la direction d'un des deux chantres qui nous gratifia de nouveau d'un chant magnifique), l’écomusée du delta à Sulina, la mosquée de Babadag
au sud du delta du Danube, aperçu non loin de là (sans la visiter) la citadelle
gênoise d’Enisala, les musées du paysan roumain
et de la littérature roumaine de Bucarest, la Maison mémorielle
Panaït Istrati à Braïla, le Théâtre de Braïla, sans compter des
églises et des déambulations à travers les villes (Bucarest en
bus, Braïla et ses environs pour découvrir les lieux des
personnages d’Istrati, Sulina et son phare sur un des bras du delta) et une
balade sur le Danube, dans les canaux et lacs du delta, et jusqu’à
la Mer noire, qui
m’a paru d’un gris métallique.
le phare de Sulina (intérieur haut)
l'église du monastère Cocos, et un des deux chantres
Mais
la grande affaire, c’était, bien sûr, plus que le tourisme, Panaït Istrati. J’ai
relu sur ma liseuse trois de ses romans (Kyra
Kyraline,
Oncle
Anghel,
Présentation
des Haïdoucs)
pour me remettre dans le bain et pouvoir discuter avec plusieurs
spécialistes de l’auteur qui faisaient partie du voyage (11
Français, 4 Roumains, 3 Autrichiens, tous
"istratiens", moi y compris, puisque c’est un des treize
écrivains qui m’ont inspiré dans D’un
auteur l’autre).
J’ai eu la surprise de découvrir dans
le groupe que
l’un des Autrichiens, Georg Kremnitz, n’était autre que le mari
de Frantze Pierre-Charles, père des deux enfants de celle qui fut ma condisciple martiniquaise à
l’École Nationale Supérieure
des Bibliothèque. Après sept ans à
la Bibliothèsue universitaire de Bordeaux, elle fut mutée à
Fort-de-France et se sépara de Georg. Je la revis lors de mon
passage en Guadeloupe, où elle m’invita à dîner chez elle, lors d'un de mes séjours en Martinique :
je racontai à ses deux enfants, alors âgés de dix et huit ans,
l’histoire d’Œdipe.
le groupe au Musée de la littérature roumaine
Nous
participâmes donc à un colloque franco-roumain sur Panaït
Istrati : une demi-journée à Bucarest au Musée du paysan
roumain, puis une journée entière à Braïla à
la Maison mémorielle Panaït istrati. Trois d’entre nous (le
président de l’Association, Christian Delrue, qui signala la parution prochaine en
mai
chez Gallimard de la Correspondance
Panaït Istrati–Romain Rolland 1919-1935,
Frederika Zephir qui nous fit une belle communication sur
l’imaginaire
de l’écrivain vagabond, Panaït Istrati et sa ville,
et Heinrich Stiehler, une
très intéressante aussi
sur
le
roumanisme rationnel de Panaït Istrati)
firent des interventions, et une bonne dizaine de Roumains
proposèrent un bel hommage (souvent en français) à l’écrivain
roumain qui, en effet, écrivit son œuvre en langue française.
un chat de Roumanie (aux abords de Braïla)
J’en
suis revenu, conforté dans mon admiration pour Panaït Istrati, et
ravi de voir que les Roumains célèbrent leurs écrivains. Le voyage
était très bien organisé, j’ai noué quelques liens amicaux
(ainsi
avec deux
des membres du groupe qui
m’ont
fait découvrir le CIRA de Marseille, Centre International de
Recherches sur l’Anarchisme, et je me suis empressé d’y envoyer
mon livre dès mon retour). Quelques-uns viendront peut-être me voir
à Bordeaux, ou bien j’irai les voir chez eux, et je me suis promis
d’aller à la prochaine AG de l’Association des amis de Panaït
Istrati en novembre prochain à Paris. Par
ailleurs, ce qui ne gâte rien, on a très bien mangé, notamment
beaucoup de poisson quand nous fûmes dans le delta. Les hôtels étaient également excellents (quoique trop chauffés, mais il paraît que les hivers sont si froids qu'on chauffe les intérieurs à 27°), même si désormais, depuis la chute de l'URSS, l'anglais a largement supplanté le français... Dommage !
dans le delta, lors d'une promenade
la mosquée de Babadaq
Bref,
je suis prêt à réitérer pour des voyages thématiques de cet
acabit.
dans le Palais Cotroceni
1 commentaire:
Merci, Jean-Pierre, pour ce compte-rendu inspiré. Je crois que nous devrions renouveler cette expérience, les liens d'amitié qui se tissent dans de pareilles occasions sont tout-à-fait dans l'esprit de notre auteur préféré.
Meilleures pensées, A bientôt, Martha
Enregistrer un commentaire