Le crime devient payant
Les criminels sont prospères
Le crime s’appelle vertu
Le juste obéit au bandit
La force prime le droit
La terreur fait loi
(Sénèque, Hercule furieux, trad. Florence Dupont, Actes sud, 2012)
Je viens de passer quelques jours très cinéphiles grâce au Festival International du Film de Bordeaux. J'y ai vu sept ou huit films intéressants, des fictions et des documentaires venant de divers pays, souvent des films en avant-première et qui sortiront — ou pas — dans les prochains mois. Car un certain nombre de films de festivals de cinéma sont à la recherche de distributeurs.
Je parlerai de trois d'entre eux seulement aujourd'hui.
Le film qui m'a touché le plus profondément est un film d'Alice Douard, Des preuves d'amour. Les réalisatrices étaient en force cette année. Le film raconte l'histoire de deux femmes qui se sont mariées entre elles. Nadia attend un enfant par PMA. Céline est très attentive à sa compagne ; mais, placée sous le regard des autres (familles, ami.e.s, docteurs, juristes, collègues, etc.) elle heurte à la difficulté d'exister dans la parentalité, d'être mère elle aussi elle aussi. Il faut beaucoup d'amour pour résister à la pression, voire à la violence de l'environnement sociétal peu averti de cette situation nouvelle. C'est un film qui m'a bouleversé par l'amplitude son humanité, d'autant plus que je connais dans ma famille proche un état de choses identique. Si le film pouvait faire évoluer les mentalités, j'en serais ravi, mais je crains que sa diffusion ne soit que trop discrète. J'irai le revoir à sa sortie.
Pendant plusieurs années, Laurie Lassalle a filmé la Z.A.D. de Notre Dame des Landes depuis l'abandon du projet d'aéroport, Dans son film Forêt rouge, on voit donc ce laboratoire de vie, se transformer peu à peu en un terrain de lutte pour sauvegarder les acquis démocratiques des années précédentes : l'occupation d'une forêt en construisant un foyer de vie qui bouscule les conventions sociales et culturelles. C'est que les occupants cherchent à proposer une autre vision de l'avenir, plus écologique, loin des folies commerciales, un lieu convivial, en autogestion permanente. Au fil des saisons et des années, ils ont construit, ils ont cultivé, ils on enchanté et bouleversé le territoire, pour en faire une utopie concrète. Et voilà qu'ils sont rattrapés par la violence des forces de l'ordre prêtes à détruire, à, transformer leur refuge en un champ de bataille d'une fureur insensée. Cette répression de l'État m'a fait penser à la violence institutionnalisée d' Israël vis-à-vie des Palestiniens. Mais les zadistes font preuve (comme les Palestiniens) d'une, force d’âme pour résister au mépris et aux vexations institutionnelles,garder assez d’énergie pour ne pas avoir peur et pour reconstruire quand les soi-disant forces de l'ordre ont tout détruit, pour tenir face aux persécuteurs. La résistance, l 'obstination, la dignité de ces femmes et de ces hommes font plaisir. Si tous les êtres humains leur ressemblaient, au lieu de s'engluer dans notre société de consommation et de loisirs imbéciles !
Quant à L'agent secret, le film brésilien de Kleber Mendonça Filho, il suit les traces d'un universitaire menacé par la dictature des années 70 pour des raisons qu'on ne saisit pas tout de suite. C'est un thriller plein de fausses pistes, de situations tendues, oppressantes, qui ne cache rien de la complexité des choses, des labyrinthes permanents de de la bureaucratie dictatoriale, des difficultés de vivre plus ou moins cachés, dissimulés sous de faux noms. Autant dire que le récit n'est pas linéaire. Pas question de s'endormir si on ne veut pas perdre le fil dans l'enchevêtrement des destinées;. Un film magistral que je reverrai volontiers quand il sortira.
Sur ce, en fin de semaine, je file vers Montpelleier assister à mon quinzième Cinémed, Festival de cinéma méditerranéen, où j'espère voir quelques bons films des pays du pourtour de la Méditerranée, quelques amis aussi et de la famille.
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