samedi 4 novembre 2023

4 novembre 2023 : Cinémed à Montpellier

 

La marche, grand lavement de l’esprit. « Mais que salubre est le vent ! » Pour penser clairement, loin des jérémiades et des abominations de l’imagination, il ne faut pas rester assis.

(Sylvain Tesson, Un été avec Rimbaud, Equateurs, 2021)



Le fait est que, quand je ne suis pas chez moi, je marche beaucoup : ainsi à la Désirade en janvier 2020, et dans mon séjour à Montpellier dernièrement. Ici, à Bordeaux, je suis presque toujours à vélo, sauf quand quelque ami.e de passage vient me voir : alors, je l’accompagne volontiers et arpente les rues, les parcs ou les quais de la ville. Sauf que, depuis jeudi matin, je suis dans l’incapacité de sortir, j’ai une douleur horrible à la jambe droite. À voir si ça va durer, ça tombe évidemment pendant les vacances de mon médecin traitant. Bon, wait and see, comme disent les Anglais.

Sinon, mon séjour à Montpellier, Pignan, Castelnau-le-Lez, Bédarieux et Lodéve s’est bien passé, sans heureusement avoir mal aux jambes… J’y ai vu les membres de la famille que je voulais voir, ainsi que des amis. Et j’ai suivi le Cinémed pendant quelques jours et vu pas mal de films intéressants. C’est mon premier et seul, pour l’instant, festival de cinéma de l’année. 

En avant-premières, j’ai vu le film de Stéphane Brizé Hors-saison (petite déception, le personnage principal, un dépressif, ne m'a pas intéressé ; sortie le 20 mars prochain) et deux films de l’Italien Marco Bellochio, L’enlèvement (en 1858, Eduardo, un garçon juif de 7 ans, qui a été baptisé en secret par sa nourrice quand il était bébé et qu’on pensait qu’il allait mourir, est arraché à sa famille par les soldats du pape, et élevé dans un établissement catholique pour devenir prêtre ; c’est noir et glaçant, mais très beau) et Marx peut attendre : là, le cinéaste se livre à une enquête familiale sur le suicide de son frère jumeau Camillo en 1968 ; cinquante ans plus tard, il réunit sa famille pour les interroger sur cet étrange frère, sur l’époque du suicide, et se rend compte que cet événement tisse une sorte de fil rouge de sa propre production cinématographique. C’est passionnant !

                                                                        Knit's Island

Parmi les documentaires, j’ai vu Knit’s Island (France) qui évoque un territoire imaginaire de jeu vidéo où les joueurs créent des avatars qui entrent dans le jeu. J’avais peur de m’ennuyer, mais c’est assez fascinant. Smiling Georgia raconte une campagne électorale en Géorgie en 2012 où un parti a sillonné les campagnes, entouré de dentistes qui ont promis aux habitants de leur donner des prothèses dentaires, non sans leur avoir arraché les dents abîmées au préalable. Les malheureux électeurs n’ont jamais vu la couleur de ces nouvelles dents.

                                  

Dans les films en compétition, ne ratez pas quand ils sortiront en France : Anna de Marco Amenta (Italie) qui conte l’histoire d’une bergère sarde se battant contre une multinationale qui veut installer sur son terrain un grand hôtel touristique, avec la complicité de politiciens corrompus, film tonifiant. Le film marocain Backstage raconte l’errance nocturne d’une troupe de danse, à la suite d’une dispute dans un couple : l’homme a volontairement raté la réception de sa partenaire qui est blessée et ne pourra plus danser lors de la tournée. Le ballet au début du film est magnifique. La belle estate (Le bel été), d’après une nouvelle de Cesare Pavese, m’a fait découvrir une réalisatrice italienne dont je n’avais encore rien vu : Laura Luchetti. Pas mal du tout.

                                                Rideau de verre

Dans la série Panorama, trois très bons films : Un été à Boujad (Maroc) raconte l’été de Karim, revenu au Maroc pendant les vacances pour découvrir la nouvelle famille de son père veuf et remarié. Dans La mère de tous les mensonges (Maroc), est reconstitué à travers des modèles réduits le quartier de l’enfance du cinéaste qui s’interroge sur une histoire occultée : les manifestations de 1981 à Casablanca qui firent beaucoup de morts et de, prisonniers. Le turc Rideau de verre dresse le portrait d’un couple divorcé : la jeune femme a obtenu du tribunal la garde de l’enfant et une mesure d’éloignement de son mari violent. Mais ce dernier ne l’entend pas de cette oreille. Le machisme méditerranéen dans toute son ampleur ! Un film salutaire !

Dans les rétrospectives, il y a eu le Libanais Maroun Bagdadi (j’ai vu deux films ; décidément, le Liban se porte mal) et l’Italien Ettore Scola (j’ai vu trois films inédits, dont le délicieux film Le ravi, datant de 1971, avec Marcello Mastroianni en exilé à Chicago où il espérait faire fortune dans la boxe et à qui il arrive de multiples avanies qui ne suscitent chez lui qu’un sourire béat permanent).

Donc un bon festival, mais pas exceptionnel. C’est un film turc qui a obtenu l’Antigone d’or : Nuit noire en Anatolie, mais je ne l’ai pas vu ; sortie en France prévue le 24 janvier prochain.

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