samedi 25 décembre 2021

25.12.2021 : Migrants 13, "la pêche du jour"

 

Quant à l’opinion, monsieur, à voir ceux qu’elle élève, ne faudrait-il pas toujours tendre la main à ceux qu’elle foule aux pieds ? (George Sand, Indiana, Gallimard, 1984)


Il est bon à Noël de faire un petit bilan de l’année, surtout quand on coincé dans l’isolement des covidiens ou autres exclus de la société. Et, bien sûr, dans mon cas, je sais que je suis soutenu, parce que je ne suis pas seul, ma fille étant là, mais je pense à ceux, atteints de covid ou cas contact, qui sont absolument seuls chez eux. Je pense aussi à tous ceux qui sont aussi très isoles, les SDF, les migrants et les sans-papiers, en butte aux tracasseries de toutes sortes, encore ceux qui ont réussi à venir chez nous sont-ils encore vivants !

Car je viens de lire l'impressionnante nouvelle (le dialogue) d’Éric Fottorino, intitulée La pêche du jour, parue dans le magazine Le Un du 15 décembre 2021. L’auteur imagine comme principal personnage un Grec, professeur d’humanités reconverti dans la pêche aux migrants noyés du côté de Lesbos et qui, apparemment, fais commerce de ces cadavres, en tant que chair humaine. Du Malien, du Guinéen, du Yéménite, etc. Il vend de tout, "mais il y a du déchet", dit-il, ceux qui ont trop stagné dans l’eau, ceux qui ont été trop battus, trop torturés avant : "Vivants, ils n’existaient pas ; noyés, ils existent moins encore. Éjectés de leurs pays, éjectés de leurs bateaux et, pour finir, éjectés des statistiques. Un bataillon de fantômes". "La Méditerranée est la route maritime la plus meurtrière du monde […] On y meurt en masse sans que ça émeuve personne. Surtout pas les dirigeants occupés de leur réélection [suivez mon regard] et des comptes de la nation. Au contraire, les pays dits d’accueil cachent à peine leur soulagement. […] Si ça ne suffit pas, s’il y a des rescapés, on crée des délits de solidarité contre qui leur vient en aide". La conversation entre le pêcheur et son interlocuteur (un journaliste, un client potentiel ?) explore toutes les pistes du drame humanitaire qui est en train de se jouer. Une fable qui nous renvoie à tous nos renoncements à la solidarité humaine, un dialogue qui se rapproche du théâtre d’intervention.


Le dialogue fera l’objet, à Paris, d’une adaptation théâtrale au Théâtre du Rond-Point, avec Jacques Weber, dans la seconde moitié de janvier 2022.

Et ceci me ramène à mes Bangladais, que je ne peux même plus aller voir, puisque contraint à l’isolement. Ils sont actuellement logés dans un apparthôtel, aux frais de l’État bien entendu. Alors qu’il aurait été si simple de leur accorder le droit d’asile qui leur aurait donné le droit de travailler, de trouver un logement, avec ou sans aide des associations humanitaires, et de subvenir à leurs besoins : Shyamal ne demande que ça, travailler ! Il est contraint de le faire, au noir, pour le plus grand profit d’un patronat qui ne demande que ça… Et dire que se montrer humanitaire, aujourd’hui, nous met sous le coup de la loi : on est criminalisé. Je n’aurais jamais pensé voir ça de mon vivant !

 

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