mardi 13 avril 2021

13 avril 2021 : les fleurs nous font devenir plus humains

 

« Le plus dur en réalité, ce n’est pas d’être heureux sans l’autre, continua-t-il, c’est de changer, de ne plus être ce qu’on était avec l’autre. »

(Muriel Barbery, Une rose seule, Actes sud, 2020)




Rose, botaniste, célibataire un peu triste, est partie au Japon à la demande du notaire d'un père japonais qu'elle n'a jamais connu. Élevée par sa mère suicidaire et sa tendre grand-mère maternelle, Rose approche de la quarantaine : elle est mélancolique et solitaire, sa mère et sa grand-mère sont mortes. Elle arrive à Kyoto, qu'elle visite sous la houlette de l'assistant et exécuteur testamentaire de son père, Paul, un Belge de son âge, veuf et nanti d'une fillette de dix ans. Les déambulations dans la ville se font selon un ordre et un itinéraire choisi par Haru, son défunt père. Elle est peu à peu séduite par la culture japonaise, la flore, la cuisine, la religiosité, l'importance du végétal et du minéral. Un lent cheminement va amener Rose à découvrir ce père disparu, à se découvrir elle-même et à trouver pour la première fois l'amour.

Chacun des douze chapitres est précédé d'un court conte ou parabole qui relate des légendes anciennes sur la pensée, la sagesse, l'histoire et la poésie du Japon et de la Chine. Une phrase de ce récit est donnée pour titre au chapitre qui suit comme un écho. Cette construction originale du roman crée une atmosphère qui nous imprègne de la découverte de la japonité. Le texte est finement ciselé, amenant peu à peu la métamorphose de l'héroïne qui va passer du deuil ("De quoi le deuil est-il le plus difficile ? De ce qu’on a perdu ou de ce qu’on n’a jamais eu ?") à la paix, comprenant que "si on n’est pas prêt à souffrir, on n’est pas prêt à vivre", entraînant dans son sillage l'assistant de son père.

On notera le rôle important des fleurs omniprésentes dans cette métamorphose. Et c'est un vieux potier, ivrogne qui donnera à Rose une clé pour se comprendre et saisir l'univers qui l'entoure en lui citant un vers de Rainer Maria Rilke : "Une rose seule, c’est toutes les roses". Et c'est tout l'art des jardins japonais qui sollicite ses sens et la sort de son égoïsme (elle se fait traiter d'emmerdeuse professionnelle par Pau). Le lecteur s'attache à Rose, pourtant souvent agressive et exaspérante. L'immersion dans une culture étrangère et totalement différente est bien retracée, avec ses ombres et ses lumières, et c'est c’est cette culture qui amène Rose à trouver enfin du sens à sa vie.

Un très beau roman qui donne envie d'aller au Japon et singulièrement à Kyoto !

 

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