L’opinion
publique est bien préparée à ce que toute violence, même minime
pour se défendre, soit sévèrement réprimée... La seule pas
réprimée, la violence patronale qui met des millions de
travailleurs sur le carreau après licenciements économiques...
(Silien
Larios, Féerie
pour une autre grève,
manuscrit)
De
temps en temps, pour se remettre en état de marche, ça fait du bien
de lire tel livre (en ce moment, je lis les fameuses Lettres
parlées à son ami allemand Helmut Waller
de Michel Tournier, dernier hommage que je puis rendre à ce bel
écrivain), d'écouter telle musique (en ce moment, des pièces de
clavecin de Rameau jouées au piano par Alexandre Paley, merci Anne de m'avoir offert ça pour mon anniversaire), de voir un
documentaire au cinéma, pour se rincer les yeux et se regonfler le
moral,
J'avais
formidablement apprécié Rue
Santa Fe
(voir ma page de blog du 7 mai 2008) de Carmen Castillo. J'ai appris
que depuis, elle a tourné un documentaire sur Victor Serge
(l'écrivain révolutionnaire sur lequel j'ai écrit un chapitre de
mon livre D'un auteur
l'autre),
pas vu, mais que je vais essayer de me procurer. Le cinéma Utopia de
Bordeaux a eu la bonne idée de programmer hier soir en
avant-première On est
vivants,
un nouveau documentaire de Carmen sur les combats et les luttes
menées ici ou là pour essayer de rendre notre monde meilleur, pour
combattre l'injustice, pour donner du sens à l'existence. On est
vivants sortira
en avril prochain et je ne saurais trop vous le recommander.
D'abord,
il y a la voix de Carmen, cette voix chaleureuse et vibrante, avec son léger
accent chilien, cette voix qui n'a jamais désarmé depuis plus de
quarante ans, malgré les défaites politiques (Chili), l'exil, qui
n'a jamais cessé de porter l'espoir de l'engagement, contre le
défaitisme ambiant qu'encourage le néo-libéralisme triomphant
(jusqu'à quand ?), le fatalisme politique et économique
décourageant (le There is
no alternative
de la monstrueuse Thatcher) et la "culture
de la peur"
que nous distillent à longueur de temps les médias (aux ordres).
Il
y a les paroles de Daniel Bensaïd, qui ponctuent le documentaire,
extraites pour la plupart d'Une
lente impatience (Stock,
2004, et qui donnent furieusement envie de lire le livre). Et puis,
il y a surtout les portraits de luttes engagées ici et là par des
hommes et des femmes qui n'ont pas eu peur de combattre : les
paysans indiens du Chiapas (Mexique), ceux de Bolivie qui se sont
battus pour le contrôle de l'eau face à l'avidité des
multinationales, les paysans sans-terre du Brésil qui occupent et
cultivent des terres laissées en friches par les grands
propriétaires, aussi bien que les militants du DAL (Droit au
Logement) en région parisienne, les ouvriers de la raffinerie de
Donges en Loire-Atlantique, ou ces femmes des quartiers nord de
Marseille qui essaient d'améliorer la vie et de donner des habitants une autre
vérité que celle véhiculée par les médias (aux ordres).
Tous
et toutes n'ont pas eu peur, tous et toutes ont redécouvert la force
du collectif et de la solidarité, tous et toutes ont retrouvé
l'espérance, le bonheur d'être ensemble. Ce n'est pas rien !
On sort de ce film revigoré. Non, rien n'est perdu : chacun de
nous peut participer à l'écriture de l'Histoire avec un grand H. Et
nul n'est obligé de s'incliner devant l'ordre (ou plutôt le
désordre) établi, celui qui favorise la violence et la guerre, la
concurrence et la compétition, l'inégalité, l'exploitation, la domination, la
pollution, l'ignorance, le chacun pour soi et le désespoir.
Un
film à voir et à revoir, merci Carmen de m'avoir illuminé cet hiver
morose ! Et un livre de plus à lire !
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