L'action
se passe en Pologne, c'est-à-dire nulle part.
(Alfred
Jarry, Ubu roi)
Il
est probable que j'ai déjà proposé cet exergue pour une page de
blog, mais il n'est pas inutile d'en remettre une couche, si ça peut
inciter quelques-un(e)s à lire ou à relire la célébrissime
pochade théâtrale de notre Jarry national, par ailleurs grand cycliste devant
l'Éternel
et qui, donc, ne peut que me plaire. Tous les tyrans anciens ou
récents y sont montrés avec la plus grande exactitude, et on en
rit ! Tant mieux !
J'ai
donc emmené les Polonais jusqu'à la dune du Pyla, que nous avons gravie
par l'escalier, puis comme ils avaient envie de tremper les pieds,
descendue vers la mer (facile, quoique...), mais il a fallu ensuite
remonter, et le plus fourbu, c'était moi, ils ont entre vingt et
trente ans de moins, pardi. Je me dis que désormais, les randonnées
en montagne, c'est quasiment fini. Mais c'est vrai que le temps passé
au bas était un bonheur simple, loin de la horde qui s'agitait au
sommet. Une fois remontés, nous avons pique-niqué près du parking,
dans l'ombre agréable du sous-bois de pins, bercés par le chant des cigales, puis sommes allés à Arcachon nous
balader et faire une petite sieste sur la plage, à l'ombre de la
jetée du môle d'où partent les bateaux d'excursion. Le soleil
était en effet ardent, et mes Polonaises ont tendance à rougir,
malgré la crème solaire. Arcachon en été, à fuir ! Odeurs de crèmes solaires, étalages humains parfois insupportables (corps, voix, téléphones portables). Seuls les enfants de moins de dix ans trouvaient grâce à mes yeux...
La
veille, ils s'étaient baladés tout seuls, comme aujourd'hui. Je les
avais rejoints au Musée des Compagnons du Tour de France, rue
Malbec. J'ignorais qu'un tel musée existât à Bordeaux (ben oui, de
temps en temps, un petit imparfait du subjonctif, ça fait du bien).
Le musée est situé à côté du bâtiment qui abrite les
compagnons, lors de leur Tour de France, quand ils s'arrêtent, en
général pour une durée d'un an, à Bordeaux. Car le compagnonnage,
c'est un mode de vie, à base d'instruction professionnelle
approfondie et d'assistance mutuelle, de solidarité et de vie
communautaire, pendant le Tour de France qui dure de quatre à six
ans. Les candidats nantis de leur diplôme professionnel
(charpentier, maçon, ébéniste, serrurier...) passent un entretien
avec un jury, des tests, et s'ils sont admis, sont accueillis dans un
des sièges du Tour. Mais pour devenir compagnon, il faut se plier
aux règles, notamment sur la vie en communauté (dans la Maison des
Compagnons, la Mère reçoit les jeunes et assure la gestion du
siège), mais aussi sacrifier une partie de son temps personnel à la
formation professionnelle continuée : cours du soir assurés
par des « anciens », apprendre à se prendre en charge, à
changer chaque année d'environnement et de cadre de vie, s'adapter à
des différents lieux de travail de tailles variées. Certains
craquent au bout de deux semaines ou un mois. Mais s'il persiste, le
jeune devient affilié en présentant au bout d'un an une première maquette. Au bout
de quelques années, il est reçu compagnon, sur présentation d'un
travail effectué en dehors de ses heures de travail et de cours. Ce
sont quelques-uns de ces chefs-d’œuvre qui sont présentés ici.
J'ai pu ainsi voir des maquettes en maçonnerie et en bois, souvent
d'une grande beauté, dont voici quelques photographies :
Au
fond, sans Krzysztof, Dorota, Anita et Renata, je n'aurais même pas
eu connaissance de cet excellent petit musée. Vivent donc la Pologne
et les Compagnons !
* * * *
27ème
anniversaire de la naissance de Lucile. Je me souviens de sa venue au
monde comme une fusée : ah ! elle avait hâte de venir, et
elle s'est sentie tout de suite bien. Très rapidement, elle ne nous
a plus réveillé la nuit, et même le matin, chose extraordinaire,
elle attendait en gazouillant qu'on veuille bien la chercher pour son
premier biberon... Quand je la vois, je pense à ces vers du poète
Michel Dunand, dans Mourir
d'aller :
"Le
bonheur me tient constamment la main. / Ne pas le saisir tient du
sacrilège."
C'est tout le mal que je lui souhaite !
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