vendredi 4 septembre 2020

4 septembre 2020 : toutes sortes de violences

 

ALBERT : Ce soir, tiens, je passais devant un grand magasin d’épicerie, qui exhibe entre des pyramides de victuailles et des portiques de vins fins des repas complets « à emporter »… Comprends-tu ? À emporter ! Trois ou quatre pauvres étaient là, qui ne paraissaient pas demander mieux. On les fit circuler. Ah ! leur regard inoubliable ! Ceux qui ont pris la Bastille devaient avoir ces yeux-là !

(Pierre Descaves, La cage, in Au temps de l’anarchie, un théâtre de combat, 1880-1914, Séguier, Archimbaud, 2001)



Ah, l'ensauvagement, soit, parlons-en, puisque nos médias et nos ministres n'ont que ce mot à la bouche ! Mais les sauvages ne sont pas seulement ceux qu’on croit. Derrière le discours sécuritaire, destiné à rassurer et à drainer les voix des électeurs (c’est bon, ça coco, ça vaut bien une interview à Valeurs actuelles), se profile un des mensonges d’État : derrière la prolifération des infectés du covid, on omet de parler des testés de plus en plus nombreux et derrière l’augmentation de la violence, on omet (et même on prétend qu’elle n’existe pas, selon les ministres) celle de la violence policière, pourtant la plus éclatante à mes yeux, et celle qui fait le plus de mal, mettent à mal la confiance en l'État.


Car la police, rappelons-le, est chargée de nous protéger. Or, elle fait peur : quand je croise un policier, je change de trottoir. Il est armé (et peut faire mal, comme l'ont constaté les gilets jaunes molestés, frappés, atteints d'une grenade ou de balles de guerre), moi pas. S’il me parle (même en m’insultant), il ne risque pas l’outrage à citoyen, mais si je lui réponds (et c’est vrai, je peux être mordant), je risque l’outrage à agent avec toutes ses conséquences judiciaires. Je n’ai pas le faciès à contrôle continu. Il m’arrive de sortir sans mes papiers. Je risque gros ; si en plus, je lui demande ses papiers (car après tout, de faux flics circulent), je ne suis pas sûr que ça lui plaise.

La manifestation, totalement pacifique, des anti-masques de Paris, samedi dernier, pourtant déclarée à la Préfecture, a été assez rudement réprimée par la police, comme presque toutes les manifestations depuis deux ans : encerclement de la foule (5 a 600 personnes prises dans la nasse) et donc impossibilité de manifester, discours interrompus, contrôles d’identité, et pour finir nombreuses amendes pour non-port de masques (amendes d’ailleurs illégales*) alors que c’était l’objet même de la manif !

Bien sûr, on préfère parler de la violence des jeunes de banlieue, des cambriolages (en hausse, effectivement, mais depuis qu’on ne peut plus braquer les banques, les apprentis truands et les truands confirmés voient bien qu’il faut trouver trouver de l’argent ailleurs) et agressions diverses (notamment à cause du masque obligatoire), sans saisir la colère de ceux qui ont été assignés à résidence par le confinement, de ceux qui, malmenés par la police, n’ont jamais pu obtenir réparation, de ceux qui, contrôlés dix fois par semaine (quand ce n’est pas par jour), n’en peuvent plus…

Et curieusement, nos médias de désinformation continue ne parlent pas de la violence du patronat qui licencie et harcèle à tour de bras, qui emploie illégalement à bas prix les réfugiés et demandeurs d’asile, la violence des propriétaires qui louent à prix d’or des logements tout petits et parfois insalubres, la violence des commerçants qui ont profité du confinement pour hausser les prix, la violence publicitaire auprès des jeunes qui fait des ravages dans leur cervelle, la violence de l’institution scolaire envers les enfants de pauvres (souvent parqués en SEGPA), la violence de l’inégalité numérique et des compteurs Linky ou de la 4G et bientôt de la 5G (imposés sans concertation), la violence de la justice institutionnelle vis-à-vis des nouveaux "misérables", sans-abri, migrants, demandeurs d’asile, la violence de la rétention (pour les sans-papiers), la violence de l’emprisonnement d'une façon générale, etc…

Car, comme l’écrit René Frégni, "La prison, nous le savons tous aujourd’hui, est l’université du crime. N’importe quel petit voleur à la tire sortira de là braqueur chevronné et le simple assassin de hasard y deviendra au fil des années tueur à gages. La prison ne tue pas le criminel en l’homme, elle renforce le crime et détruit toute trace d’humanité". Rappelons-nous ça chaque fois qu’on poursuit de notre vindicte (aussi légitime soit-elle) tout accusé.


* DÉCLARATION QUI ÉTABLIT L’ILLÉGALITÉ DE LA CONTRAVENTION DE 4EME CLASSE QUI SERAIT IMPUTÉE EN CAS DE DÉFAUT DU PORT DU MASQUE DANS LES LIEUX IMPOSÉS PAR LE DÉCRET DU 10/07/2020

Pour que l’infraction soit imputée et sanctionnée, il faut, aux termes du principe de légalité prévu à l’article 111-3 du Code pénal et conformément à l’article 111-4 de celui-ci sur l’interprétation stricte de la loi pénale, que les textes d’incrimination et de répression soient clairement énoncés afin qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur l’incrimination et la répression.

Or, tout le monde prétend que le défaut de port du masque est sanctionné par une contravention de quatrième classe telle que visée à l’alinéa 3 de l’article L-3136-1 du Code de la santé publique.

Or, l’alinéa 3 du texte précité réprime par une contravention de quatrième classe les infractions visées aux articles L 3131-1 et L 3131-15 à L 3131-17 dudit Code.

Toutefois, les textes précités ne peuvent en aucun cas être appliqués au « défaut de port de masque » pour les motifs suivants :

  • L’article L 3131-1 ne s’applique qu’au règlement pris « par le Ministre chargé de la santé et par arrêté motivé ». Or, les dispositions du décret du 10 juillet 2020 ont été édictées par un décret du Premier Ministre et non par arrêté ;

  • S’agissant des dispositions des articles L 3131-15 à L 3131-17, celles-ci ne sont applicables que dans les circonscriptions dans lesquelles l’état d’urgence est déclaré.

Les dispositions, relatives au port de masques, des articles 27 et 38 du décret du 10 juillet 2020, s’appliquent aux « territoires sortis de l’urgence sanitaire », et ne sont donc pas applicables ;

  • Enfin, le texte de répression ne vise en aucun cas le décret du 10 juillet 2020, de sorte qu’aucune répression ne peut être appliquée au défaut de port de masque.

Toutes verbalisations effectuées par un policier, un gendarme ou toute autre personne habilitée par la loi sont ainsi entachées d’une illégalité manifeste, ainsi que d’un abus de pouvoir.


Maître Carlo Alberto BRUSA, Avocat à la Cour Président de
l’Association REACTION 19

Et Président du Cabinet d’Avocats CAB ASSOCIES, Avocats à la Cour


Je vous autorise à imprimer le présent document, à le déposer dans tous les Commissariats et toutes les Gendarmeries, afin qu’il soit donné large écho aux erreurs graves commises par la mise en œuvre d’une répression qui n’a aucun fondement légal ni réglementaire.


 

Réaction 19, 63, rue la Boétie - 75008, Paris, France


 

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