jeudi 1 avril 2010

1er avril 2010 : le salaire maximum enfin voté !


- Des méchants, peut-être pourrait-on s‘en accommoder ; il y a pire : ceux qui caressent les méchants pour vivre confortablement à l‘abri de leur conscience.
(Michel Candie, Marie Read, femme pirate)


Qu’est-ce que j’apprends ce matin, à la radio : le mot "socialist" est une injure aux Etats-unis ! En voilà une nouvelle ! Mais qui ne m’étonne guère, l’oncle Sam, à en juger par les dialogues des films dont il nous abreuve, n’est pas avare de jurons ! Mais enfin celui-là : faut-il que l’URSS ait causé un tort énorme au mot même de socialiste ! Je ne suis pas certain d’ailleurs que, pour certains des jeunes sbires entraperçus lors des résultats des élections à une certaine permanence parisienne, ce ne soit pas aussi une injure (je ferais mieux de ne jamais regarder la télé…) !

Quand je pense qu’après plus d’un siècle de suffrage (presque) universel, on trouve encore le moyen d’aller perdre une partie de son temps (et il ne m’en reste que si peu, à moi, comme à tous les retraités) pour aller abdiquer son pouvoir personnel au profit d’un(e) individu censé(e) nous représenter. C’est-à-dire qu’on lui abandonne notre pouvoir, qu’on le(la) laisse privatiser tout ce qui nous appartient, le téléphone, la poste, l’électricité, les chemins de fer, les banques - c’est déjà fait - bientôt l’école, l’hôpital et les retraites. Et on abandonne ce pouvoir à des gens qui ne prennent jamais le métro, qui ne savent pas ce que c’est que d’acheter un pain, que de se ronger les sangs parce qu’il va quand même falloir joindre les deux bouts, qui n’ont aucune idée de ce qu’est la mouise. « Certains ont le savoir mais ignorent tout de la vie, la vraie, celle qui sort de tes boyaux, celle qui s’achève dans les fosses communes. Les hommes n’ont que l’usufruit de leur existence », nous rappelle Joseph Bialot dans son beau roman, Le jour où Albert Einstein s’est échappé.

Mais c’est que derrière tout ça, toutes ces élections "pièges à cons" (au fond les slogans de Mai 68 avaient un réel fondement), il y a des complices, des requins aux dents aigües qui attendent des profits juteux des extorsions que les puissants vont pouvoir réussir à soutirer au peuple grâce au vote. Oui, nous gagnons le droit d’être tondu, voilà ce qu’est le droit de vote. Le droit à l’inexistence, puisque on en prend pour cinq ans, ou six ans, pendant lesquels on a cessé d’exister, d’émettre, de protester. Comme si dans un mariage, l’un des conjoints soudain cesse quasiment de parler (à cet égard, le beau film de Renaud Bertrand, Nous trois, hélas, un échec commercial, est très édifiant), et attend que les décisions soient prises exclusivement par l’autre. C’est parfois ce qui se passe, d’ailleurs, et une des causes des échecs conjugaux.




Par contre, j’ai participé avec plaisir le mardi 23 mars, à la manifestation unitaire qui a défilé de la promenade des Cours jusqu’à la Préfecture. J’allais dire : il n’y avait que des vieux. C’est caricatural, mais c’est un peu vrai. Là, au moins, on existe. On devrait manifester plus souvent, surtout quand nos "élus", il est vrai pour une grande part issus du monde des requins ou affiliés à la mafia des spéculateurs, sont en train de ronger peu à peu toutes les conquêtes sociales. Mais pour manifester, il faut avoir un minimum de goût de la révolte. « Je commence à comprendre pourquoi les pauvres ne peuvent pas faire la révolution. La déchéance physique détruit les ressources de la dignité. La révolte est un luxe, » nous dit Mihail Sebastain dans son superbe Journal. Joseph Bialot, lui, explose : « J’ai fait le tour du monde. J’ai découvert la crasse et la famine des arrière-cours de la prospérité occidentale. »

Allons-nous, comme les peuples du Tiers Monde, nous laisser déposséder encore plus sans réagir ? Pourquoi ne propose-t-on pas des mesures simples ? Pourquoi y a-t-il un salaire minimum, et n’y a-t-il pas un salaire maximum ? Idem pour le minimum vieillesse : pourquoi n’y a-t-il pas un maximum vieillesse ? Je suis certain que ça réglerait rapidement le soi-disant déficit des régimes de retraite par une plus juste répartition ! Est-ce si difficile que de partager un peu : « Pour faire un tel sacrifice, disparaître pour le bien de l‘autre, il faut l‘aimer vraiment », viens-je de lire dans un roman magnifique de Milena Agus, Mal de pierres, que je vous conseille vivement. Faut croire qu'on ne nous aime pas, en haut lieu !

Libre ensuite à ceux qui en veulent plus de penser pendant leur vie à cotiser personnellement pour un complément privé : ils verront ce que donnent les fonds de pension ! Je ne suis pas sûr, par exemple, sauf si je meurs au-delà de quatre-vingts ans, de récupérer ce que j‘avais mis de côté pour ce fameux complément. Ne nous laissons pas abattre par la cohorte des petits-bourgeois, que stigmatisait déjà il y a cent ans Maxime Gorki, ceux qui aiment « vivre dans le calme et la beauté, sans participer à cette lutte, leur position préférée étant une existence paisible à l’arrière de l’armée la plus forte. »

Romain Rolland me l’a rappelé dans Jean-Christophe : « Vous êtes dans le plus beau pays, vous êtes doués de la plus belle intelligence, du sens le plus humain, et vous ne faites rien de tout cela, vous vous laissez dominer, outrager, fouler aux pieds par une poignée de drôles… Levez-vous, unissez-vous… Balayez votre maison. » Oui, balayons, et sans crainte des lumbagos ! Et ne nous laissons pas accabler par « concurrence et rivalité d'une part, de l'autre opposition d'intérêts, et toujours le désir caché de faire son profit aux dépens d'autrui », que dénonçait il y a plus de deux cents ans l’ami Jean-Jacques Rousseau, et qui hélas, ont bien creusé leur nid depuis.

Et, ô joie, je viens d’entendre à la radio que ma proposition d’un salaire maximum et d’un maximum vieillesse viennent d’être soumis au Parlement, et que tous les députés vont la voter comme un seul homme, toutes tendances confondues ! Au journal radio précédent, j’ai appris que le concours de Miss France étant annulé, c’est le concours de Monsieur Cyclo-lecteur qui va le remplacer. Comme je suis l’unique candidat, j’ai mes chances !


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