mardi 22 août 2023

22 août 2023 : retour de la censure et des interdictions

 

ISOTTA : Ce qui me dégoûte dans la haine, c’est sa grossièreté : elle accueille n’importe quel bruit, se nourrit de tout, sans examen, sans discernement. Comme elle est bête et rend bête !

(Henry de Montherlant, Malatesta, Gallimard, 1946)



La censure revient en force : on tempête vigoureusement, en occident, contre les pays musulmans ou les dictatures africaines, asiatiques et latino-américaines. C’est vrai que le film Barbie est exclu de beaucoup de pays, car il pousserait à l’homosexualité féminine : je n’en sais rien, je n’ai pas vu le film et n’ai pas l’intention de le voir.

Mais sait-on qu’en France, pour des raisons analogues, notre célèbre ministre de l’Intérieur, M. Darmanin, a interdit la vente aux moins de dix-huit ans d’un roman pour adolescents, Bien trop petit, de Manu Causse : "description complaisante de nombreuses scènes de sexe très explicites ", dixit l’arrêté d’interdiction. Résultat, ça donne envie de lire ce brûlot ! Introuvable chez l’éditeur, introuvable en librairie, la pieuvre Amazon le propose à 50 €, plus de trois fois le prix de vente de l’éditeur, il n’y a pas de petite profits pour ces géants du capitalisme moderne. En effet, quand on interdit un livre aux moins de de dix-huit ans, on signe son arrêt de mort. Le livre en question doit être demandé au libraire, on ne peut pas le mettre à la vue du public, il est dans les réserves.

"Tout en concevant la nécessité de dispositifs permettant d’avertir ou de protéger les mineurs à l’égard de contenus à caractère raciste, haineux, violent, discriminatoire, faisant l’éloge de la pédocriminalité ou de la pornographie, la SGDL (Société des Gens de Lettres) s’étonne que le livre soit aujourd’hui le seul média soumis à de telles règles d’interdiction, quand dans le même temps l’internet propage et diffuse librement, sans véritable contrôle ni restriction, des contenus relevant clairement de ces catégories". Je veux bien croire que le roman en question a sans doute des passages olé olé, puisqu’il "traite de la sexualité, des complexes et des inquiétudes qu’elle fait naître chez les adolescents", mais ces derniers ne sont plus aujourd’hui les oies blanches qu’ils ont pu être à mon époque : ils en savent plus à dix ans que moi à seize ans. Dans quel monde hyperprotégé vivent donc nos commissions de censure, à l’heure d’internet, des réseaux sociaux et de la sexualité omniprésente ?

Fort heureusement, l'Association des Bibliothécaires de France n'a pas tardé à se dire "farouchement opposée à la censure", moyennant quoi le livre ne figure pas au catalogue de beaucoup de bibliothèques de lecture publique, dont celles de Bordeaux. S’il y est, il doit être en réserve et il faut sans doute le demander, car il ne peut pas être en vue sur les rayons où traînent les mineurs. L’arrêté ministériel lie les bibliothécaires qui ne doivent le proposer qu’aux majeurs. Si on ne peut plus proposer que des livres inoffensifs, de l’eau de rose, qu’on le dise clairement. Et qu’on ne s’étonne pas que les ados s’éloignent des librairies et des bibliothèques, de la pratiques des livres si justement on leur interdit ceux qui pourraient les intéresser et leur être utiles. Il est vrai qu'ils peuvent aller voir Barbie, le film est inoffensif !

Notons que c’est le même ministre qui essaie d’interdire toutes les vraies oppositions, par exemple les Soulèvements de la Terre !!!

Je sens que je vais me faire des ennemis !

Aucun commentaire: