J’ai toujours détesté la plage, je n’ai que des souvenirs traumatisants liés à la plage, des sensations de bruit, d’odeurs, d’impudeur, de sable jusque dans les pores, de complexes physiques exacerbés par la quasi nudité, cette sensation étouffante que toute la plage ne regardait que moi…
(Fabrice Caro, Broadway, Gallimard, 2020)
Au fond, je suis assez d’accord avec le personnage du livre de Fabrice Caro. Les vacances à la mer, très peu pour moi. Ça pouvait être chouette, à la rigueur, avec mes enfants, mais aujourd’hui ? Déjà, j’aime pas énormément nager, j’ai toujours eu une phobie de l’eau (avec mon cauchemar récurrent de noyade jusqu’à la soixantaine), et bronzer n’a jamais été mon truc. Avec la chaleur en plus… Je préfère encore, quand il fait très chaud, aller passer les après-midis au cinéma. Il n’y a pas grand-monde, car la population s’agglutine devant les marchands de glace ou sur les terrasses de café, quand ce n’est pas au restaurant (l'été, c'est la "grande bouffe") ou dans les voitures, pour aller à la plage, justement.
De plus, le cinéma propose de très bons films étrangers, dont des reprises (du cinéma italien de la grande époque, par exemple, ou la rétrospective Pasolini) et des nouveautés sidérantes, parfois en avant-première, venant de Corée, Égypte, Iran, ou Japon. Je signale pour mémoire le très bon film coréen Decision to leave, où l’on voit un inspecteur de police s’empêtrer dans son enquête en tombant amoureux de la principale suspecte. J’ai vu ce film à Poitiers lors de mon vagabondage de la mi-juillet. il m'a enchanté.
En déplacement à Clermont-Ferrand le dernier week-end pour dire au revoir à Mathieu avant son départ pour l’Allemagne, nous avons vu Tempura, un film japonais. Une sorte de romance entre une trentenaire japonaise et un jeune homme nettement plus jeune qu’elle, et qui semble tout aussi réfractaire à se lancer dans une histoire d’amour. Ce qui m’a, évidemment, rappelé ma jeunesse et mes difficultés à me lier d’amour. La jeune trentenaire se parle à elle même en commentant ce qui lui arrive d’une voix masculine, et elle en cause aussi à sa collègue de travail qui elle cherche à se caser également… Une histoire d'amour balbutiante mâtinée au drame de la solitude et ça fait finalement une sorte de comédie presque enjouée, avec deux protagonistes aussi timides l’un que l’autre. À l’époque des coucheries immédiates (et sans lendemain), ça m’a fait plaisir. La réalisatrice a for bien dirigé ses acteurs.
Avec Leila et ses frères (Leila's Brothers), film iranien (mais tourné ailleurs qu'en Iran et interdit là-bas) présenté au Festival de Cannes, on a affaire à une histoire de famille : le père, une sorte de patriarche de 80 ans, est rejeté par sa propre fratrie. Ses quatre fils (entre 40 et 50 ans) sont tous au chômage. Leila, la fille unique, n’a jamais pu trouvé de mari, à cause des dissensions familiales. C’est la seule qui travaille, y compris à la maison (elle dit à son père : « Je suis votre bonniche »), et elle aimerait bien ouvrir une boutique pour donner du travail à ses frères. Mais pour cela, il faudrait que le père accepte de donner un peu d’argent... C’est un drame social très réussi, avec des personnages forts, auxquels on s’attache et qui sont joués par des acteurs et actrices épatants. Un peu long (plus de 2 h 45), mais on ne s’ennuie pas une seconde.
Quant à La conspiration du Caire (Boy from Heaven), l’Ègyptien Tarik Saleh nous donne un film politico-religieux, qui se passe dans l'université Al-Azhar du Caire, haut lieu de l'enseignement et de la pensée de l'Islam, équivalent du Vatican pour la religion musulmane. Un endroit que le gouvernement égyptien cherche à noyauter, en influençant notamment l'élection du Grand Imam. C'est ce moment que montre le film, proposant l'itinéraire d'un étudiant novice, modeste fils de pêcheur, qui a obtenu une bourse pour y apprendre la théologie, et qui se trouve pris malgré lui dans les intrigues politico-religieuses de l’élection du nouveau grand imam. Film passionnant de bout en bout, impressionnant même, tant pour les scènes de groupe que pour celles plus intimes. Il est certain que Tarik Saleh va se faire de nouveaux ennemis dans son pays d'origine : le film (coproduit par Arte et d’autres pays européens) n'a évidemment pas pu être tourné en Égypte (où il sera peut-être interdit), mais paraît juste, y compris les scènes de rue. L’interprétation est formidable, un film magnifique où on ne s'ennuie pas une seconde.
1 commentaire:
Bonjour, je suis contente que Leila et ses frères vous ait plu. C'est vrai que c'est long mais qu'est-ce que c'est bien. Les acteurs sont tous formidables.
En revanche, pour Decision to leave ma'a quelque peu déçue sauf la fin. Du même réalisateur, j'avais préféré Mademoiselle. Bonne après-midi.
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