jeudi 29 octobre 2009

29 octobre 2009 : Katalin Varga, un film


 
Notre destin est l'exécution d'une partition que nous ne découvrons qu'en la déchiffrant. Nous sommes l'instrument et celui qui en joue. Mais qui est le compositeur ?
(Jacques Brosse, Le bonheur-du-jour)

Le viol reste encore aujourd'hui un des crimes absolus, parce qu'il brûle aussi l'âme. On n'en sort jamais intact. J'en ai déjà causé dans mon blog du 31 juillet 2008, celui qui m'a d'ailleurs valu le plus de courriers, et de témoignages émouvants. La Nouvelle République ce matin relate de nouveau un fait divers inquiétant de ce type. Et encore ne savons-nous qu'une part très faible de l'iceberg «viol». Car on ne raconte pas volontiers le viol dont on on a été victime, la honte de s'être laissé(e) faire étant sans doute plus forte que toute idée de justice, et la tentation de l'oubli, de l'effacement étant une façon de se protéger (que l'on croit). Il faut souvent un événement extérieur pour contraindre la personne violée à parler. Ou bien l'impossibilité intérieure de continuer à garder le silence.
Cela m'a remis en mémoire qu'il y a dix jours, je suis allé voir à Paris le film roumain de Peter Strickland, Katalin Varga. L'héroïne éponyme a craqué au bout de onze ans et l'a dit à sa meilleure amie, sous le sceau du secret, bien sûr. Résultat, en une seule journée, tout le village est au courant, Katalin est montrée du doigt, victime des rumeurs (c'est forcément une «pute»), reniée par son mari, et contrainte de s'enfuir en charrette avec son fils Orban, qui ne comprend pas pourquoi, et à qui elle a dit qu'ils vont voir la grand-mère, soi-disant malade. Et nous roulons au pas du cheval sur les routes de la montagne roumaine, dans ces beaux, mais inquiétants aussi, paysages de Transylvanie, au milieu d'une population paysanne méfiante. Même si elle s'est longtemps tue, Katalin en fait n'a rien oublié. Et pour cause, Orban est le fruit de l'agression qu'elle a subie. Peu à peu, on comprend qu'elle part au devant de son destin : la vengeance. Elle veut retrouver les deux hommes qui l'ont agressée, même si un seul l'a violée.

Katalin Varga est-il un bon film ? Je ne sais. Il m'a beaucoup intéressé. Un beau film, en tout cas, visuellement, sorte d'histoire poétique à la Panaït Istrati, auquel le film m'a fait penser immédiatement. Le «méchant», qu'elle finit par retrouver, s'est marié, mais l'union reste stérile, sa femme pensant que l'un des deux a péché (à juste titre). Mais rien n'est manichéen : chaque personnage a ses faiblesses, on a affaire à des humains qui ne sont pas antipathiques, même le violeur, qui regrette semble-t-il sincèrement. Bien sûr, tout cela finira mal. Ce n'est pas un roman à l'eau de rose.
Le film montre bien que la vengeance n'est pas la solution. Mais une autre face du mal.

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