Voyager,
c’est, de même qu’étudier, faire un long bail avec la jeunesse.
Il n’existe pas, je crois, de plus efficace fontaine de jouvence
que ces deux choses combinées : voyage et activité
intellectuelle.
(Alexandra
David-Néel, Lettre du 4 mai 1919, Journal de voyage,
lettres à son mari, 14 juillet 1918- 31 décembre 1940,
Pocket, 1988)
Après
Yvon, Jean. Le point commun entre les deux, c’est que probablement,
si je ne m’étais pas marié, je n’aurais connu ni l’un ni
l’autre. Car célibataire, je n’aurais sans doute jamais postulé
pour la Guadeloupe (ni rencontré Yvon), Claire, plus aventurière
que moi, m’en ayant donné l’envie, et Jean était un cousin
germain par alliance de Claire, donc sans elle, pas de Jean non plus. Il travaillait aux Salins du Midi,
endroit que je n’aurais sans doute jamais visité sans y être
introduit.
Jean à côté du cyclo-lecteur, avril 2008
Mais,
comme pour Yvon, le courant est tout naturellement passé entre nous
dès notre première rencontre que je situerai à l’été 1980, où
nous débarquâmes à vélo chez lui, à Aigues-Mortes, lors de notre
première grande randonnée vélo (la deuxième fut l’été
suivant, et nous y passâmes à nouveau). Je fis donc connaissance
de Thérèse, sa femme, cousine germaine de Claire, décédée
brutalement il y a douze ans de ce qu’on aurait appelé autrefois
un coup de sang, et de leurs enfants. Parallèlement à leur maison
d’Aigues-Mortes, ils ont acquis une résidence secondaire à
Brandonnet, dans l’Aveyron. c’est là que j’ai vu Jean pour la
dernière fois en juillet dernier. Il était très affaibli. Pour la
première fois, il ne cultivait pas son jardin et ne faisait que se reposer au
grand air de la campagne. Il
fréquentait ses voisins et ses cousins, son fils cadet est venu
passer une quinzaine avec lui.
Jean à Bordeaux en 2014, sur le bateau
Si
je le compare à un chêne, c’est que Jean avait l’air d’être
enraciné, aussi bien à Brandonnet qu’à Aigues-Mortes. Et solide,
et rugueux, et noueux. Et qui
abritait bien qui vivait avec lui. Certes, il ne devait pas toujours
être commode. Mais hospitalier, oui. Suffisamment bien dans sa peau
pour faire, dans les années 2010, après le décès de sa femme, un
voyage au Cambodge avec une amie et un autre en Algérie avec des
anciens du contingent, et
encore quelques jours avant sa mort brusque, un voyage organisé de
quelques jours en Bretagne.
Curieux des autres, pas raciste pour un sou (il est vrai que vivant à
Aigues-Mortes, haut lieu de la persécution contre les protestants
au XVIIIème siècle et contre les immigrés italiens en 1893, il connaissait les désastres de l’intolérance), bon lecteur aussi, il
m’avait invité à faire une lecture en plein air au cours de ma
cyclo-lecture de 2008.
Jean et son amie devant le Monument des Girondins, août 2014
Je
l’ai vu aussi souvent que j’ai pu, dans
le Gard ou dans l’Aveyron.
Il est venu me voir il y a
quelques années avec son
amie à Bordeaux, et nous avons visité la ville, fait la
croisière-découverte en bateau sur la Garonne. Son
état de santé s’était pas mal dégradé depuis quelque temps et
il faisait des séjours à l’hôpital de temps en temps. Mon grand
regret : qu’il ne soit pas venu nous rendre visite lors de
notre séjour en Guadeloupe. Il aurait aimé ! Surtout
qu’il était encore jeune à ce moment-là, mais j’imagine que le
coût de l’avion devait être prohibitif, surtout pour une famille
avec trois enfants. Dommage ! Mais il fait partie de ces gens qu’on
n’oublie pas et, quand je verrai un chêne, je penserai à lui.
Jean avec deux de ses petits-enfants, non loin de la maison de Brandonnet
(photo Christine Bec)
(photo Christine Bec)
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