...ceux
qui manquent de tout et surtout d’amour qui puisse les convaincre
qu’ils sont aimables, que leur vie a un sens, que leur vie est
nécessaire à la vie, que sans eux qui manquent de tout il
manquerait quelque chose à nos vies.
(Yvon
Rivard, Le
dernier chalet,
Leméac, 2018)
La
technologie est en train de nous broyer peu à peu : nouveautés
électriques
ou
électroniques de plus en plus nombreuses et de plus en plus
sophistiquées (objets de cuisine sans
cesse renouvelés grâce au courant électrique,
mais où va-t-on mettre tout ça dans nos minuscules cuisines ?
objets de déplacements : mono-roues,
gyropodes, trottinettes,
vélos, scooters,
voitures
électriques, mais
combien de centrales nucléaires supplémentaires va-t-il falloir
pour nourrir tous ces engins soi-disant "propres ou verts" ?)
sans oublier toute la connectique et robotique qui doit bientôt
supplanter tout contact humain : consultation médicale, achats et bientôt paiements (disparition de l'argent liquide programmée : boudiou, il est temps que je disparaisse),
contacts faits de façon virtuelle avec le triomphe du smartphone,
dans une fuite en avant énergétique qui laisse pantois le
"décroissant" que je suis.
mon minable vélo antédiluvien, vrai dinosaure d'après les jeunes du quartier :
« Quand achetez-vous un vélo électrique, Monsieur ?
- Quand je n'aurai plus d'énergie musculaire, jeunes gens ! »
- Quand je n'aurai plus d'énergie musculaire, jeunes gens ! »
Tiens,
le smartphone, parlons-en. Je vais sans doute me répéter. Je sais
que je livre un combat d’arrière-garde, mais c’est ma liberté
que je défends. Je n’ai nulle envie d’être connecté en
permanence, suivi dans tous mes déplacements privés ou publics,
donc espionné (même si je n’ai rien à cacher) et par ailleurs,
j’ai besoin du contact humain, mais du vrai, en chair et en os. D’ores et déjà, pour prendre les
bus "Macron", on est obligés de passer par internet.
Paraît que la SNCF va encore supprimer plus de mille postes
d’employés en gare (prétexte : de plus en plus de gens
prennent leurs billets avec leur smartphone) : déjà que les
agences de voyages sont en voie de disparition, les guichets de gare
vont faire de même. C’est une raison de plus que j’aie de me
rendre à la gare pour acheter mes billets (même s’ils sont
électroniques !). Les gens se plaignent du manque de temps :
forcément, quand on passe quatre heures par jour (et je dois être
largement au-dessous de la réalité) l’œil rivé sur le
smartphone, on manque de temps (je me demande comment font ceux qui travaillent) ! Et c’est ainsi qu’on ne
prend plus le temps de lire (il est vrai qu’il faut aimer lire) ni
d’aller au cinéma et au théâtre (non, on est plutôt addict aux
séries, de
préférence américaines, bonjour la colonisation culturelle,
qu’on regarde d'ailleurs aussi sur le smartphone) ni
au musée (il est vrai que ces derniers proposent des visites
virtuelles… ah, c’est beau de faire ces visites sur un écran
plus petit qu’une carte postale).
et mon portable, qui ne fait que téléphone, pourtant récent :
suis-je ringard, tout de même!!!
Et
les contacts humains, dans tout ça ? Je ne sais si j’ai déjà
raconté la scène suivante qui s’est passée à mon retour de
Venise dans le parc en bas de chez moi. Je revenais de faire mes
courses du matin, il était à peu près 11 h. Je passe devant le
parc de jeux des enfants, parc entouré d’un grillage : il y a
des balançoires, tourniquets, toboggans… Il y avait là une
vingtaine d’enfants de un à trois-quatre ans et un certain nombre
de mamans sur les bancs qui surveillaient ou pas, car huit sur dix
étaient plongées dans leur idole du jour, le smartphone,
prolongement de leur main (remarquons que ça permet tout de suite
d’identifier les gauchères). J’aperçois un gamin qui fait une
mauvaise chute en bas du toboggan. Rien de grave, mais il a eu peur
et il se met à bramer. Il se dirige vers sa mère, et lui accroche
la robe, en continuant à chialer. Elle, qui pianotait en toute
innocence, lève la tête et le rabroue de la façon suivante
(textuellement) : « Qu’est-ce que tu viens me faire
chier, là ? Tu vois pas que je suis occupée ! Va t’amuser
et arrête de m’emmerder... »
"Hélas
! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes, / Que j'ai honte de
nous, débiles que nous sommes !"
chantait Vigny. Pauvres enfants qu’on ne sait plus aimer, livrés à
eux-mêmes ou à ces machines modernes :
on
leur met la télé pour avoir la paix, et dès le plus jeune âge,
des consoles de jeux vidéo (qui sont souvent des jeux guerriers, où
il s’agit de dégommer l’ennemi). Et on s’étonne après qu’ils
aient des difficultés scolaires d’apprentissage, de comportement,
de savoir-vivre, qu'ils soient violents. Les enseignants ont bien du mérite. Mais, quand on
n’a pas envie de s’occuper de ses enfants, on n’en fait pas !
Personne n’est obligé de faire des enfants, surtout en notre temps
de surpopulation et de dévastation de la planète. Quel sens de la
vie vont-ils découvrir, ces
enfants ?
Subjugués
par
les machines électroniques, la
publicité
et la surconsommation (là aussi, les
observer
au supermarché, c’est édifiant !), je
les vois devenir, au mieux, indifférents aux autres, au pire,
violents et destructeurs.
Conclusion :
c’est pas demain la veille que je vais acheter un smartphone, j’entre en
Résistance !
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