vendredi 14 septembre 2018

14 septembre 2018 : un manifeste pour l'égalité de "toustes" ?


accepter pleinement la différence des sexes et pourtant refuser ce qui en découle dans notre société. Refuser ce qu’on fait aux filles et aux garçons, et en particulier qu’il faille nécessairement leur apprendre qu’ils sont des filles et des garçons. Refuser de les transformer en filles et en garçons, c’est-à-dire en caricatures, en stéréotypes, en images d’Épinal.
(Thierry Hoquet, Sexus nullus, ou l’égalité, iXe, 2015)


Eh bien, à peine rentré, je me suis lancé dans la lecture (encore, me dites-vous ? Ben oui, y a pas de raison, j’ai appris à lire, j’ai du temps devant moi, il y a des tas de livres que j’ai envie de lire, et pourquoi m’en priverais-je, puisque j’aime ça. Ceux qui ne lisent pas peuvent toujours trouver comme excuse : « Je n’ai pas le temps », la vérité est qu’ils n’aiment pas ça. Ils trouvent bien du temps à perdre en allant au bistrot, voir un match de foot ou de rugby, regarder une nième émission de télévision… En réalité, on fait ce qu’on aime, on ne fait pas ce qu’on n’aime pas. Osons le dire, et ne pas nous cacher sous des prétextes ou des excuses bidon !) d’un livre que m’a prêté mon ami G. à mon retour de Venise. Il s’agit d’un livre dont je ne connaissais pas l’auteur, et dont je n’avais jamais entendu parler, bien que paru depuis 2015. Depuis, il semble que Thomas Hoquet ait écrit une sorte de suite, intitulée Déicide, ou la liberté (même éditeur féministe), en attendant sans doute de terminer sa trilogie sur ..., ou la fraternité ?.


C’est un roman politique, mais à la manière d’un conte philosophique à la Diderot ou à la Voltaire. L’auteur nous convie à nous interroger sur la question du genre (masculin/féminin) à propos d’une élection présidentielle en France, tout à fait transparente, puisqu’il se serait agi de celle de 2018 si le héros, notre Candide candidat imaginaire, prénommé Ulysse Riveneuve (en référence à l’Odyssée ?) s’y était présenté. Son programme unique : faire disparaître la notion du genre, donc du sexe, dans notre état-civil et sur les cartes d’identité, le genre ne sera plus considéré, au même titre que la religion ou les origines, que comme une donnée privée. Riveneuve va démontrer au fil de sa campagne électorale le bien-fondé de son idée toute simple et peu à peu gagner les médias, les médecins et biologistes (car effacer le sexe de l’acte de naissance n’altère en rien la différenciation sexuelle réelle), les juristes, les athées aussi bien que les représentants des différentes religions, les féministes et fin de compte presque tout le monde, en dehors des fieffés réactionnaires et intégristes de tout poil, il est vrai, fort nombreux. Et ça pourrait changer toute la société. Allant jusqu’au bout de l’idée (et l’on sent pointer ici l'auteur, philosophe spécialiste des Lumières), le candidat nous convie à imaginer une nouvelle société et à nous interroger sur la notion de genre, son sens et son utilité dans nos sociétés, sur l’éducation des garçons et des filles ("Le monde des enfants est le premier cercle du royaume des normes"). L’auteur se montre particulièrement critique, voire ironique, sur la classe politique dans son ensemble, sur la nullité des médias, quand ils sont pris de court par une idée nouvelle, et surtout par un quidam non issu du sérail politique. Il donne les arguments pour et contre (ceux-ci provenant principalement du Parti Pour Tous, inénarrable assemblage unifié du FN et de la droite conservatrice), et en fin de compte parvient à convaincre et à être élu.
Un livre qui fait réfléchir sur les transformations de la société (mariage pour tous, PMA, GPA, mixité) et à l’heure des "meetoo", "mais délivre-nous du Mâle !" et autres "balance ton porc", il nous invite à réfléchir sur les difficiles conquêtes de l’égalité, toujours potentiellement suspendues (acceptation et non pas simple tolérance des diverses formes de sexualité, acceptation et non pas simple tolérance de l’interruption de grossesse, parité insuffisante dans les professions et la politique) sur la situation des femmes, toujours citoyennes de seconde zone, sur la frilosité des diverses gauches, toujours un peu (et même beaucoup) machistes.
Ça pourrait être ennuyeux : c’est palpitant, et ça nous change des nombreux ouvrages se disant politiques sur les campagnes présidentielles, qui nous plongent dans l’inintérêt le plus absolu. Ici, les discours, les manifestes (le "Manifeste Unisexe"), les débats sur les plateaux télévisés, tout concourt à maintenir l’intérêt. Et si on sortait des stéréotypes de genre, si on permettait à chacun de devenir ce qu'il veut, si "Sexe ne rimait plus avec Pouvoir" ?  Le mot "épicène" est longuement développé : Amélie Nothomb aurait-elle lu ce livre qui lui aurait donné l'idée de son nouveau roman ???

 

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