lundi 27 mai 2013

27 mai 2013 : sauvons "La quinzaine littéraire"


Celui qui épouse son temps sera vite veuf.
(Joseph Brodsky)

Mes chers amis, si vous avez de l'argent de trop, et pas forcément envie de le donner aux impôts, vu ce que nos gouvernants en font, je vous invite fortement à soutenir La quinzaine littéraire, le bimensuel de Maurice Nadeau (102 ans, toujours bon œil, à défaut de bon pied). Maurice Nadeau est un des plus fins éditeurs de l'après-guerre. Ce grand résistant (il échappa de peu à la déportation), qui fut de tous les combats politiques (Manifeste des 121 en 1960), a fondé sa revue en 1966, et cette revue exigeante m'a fait découvrir nombre d'auteurs près desquels je serai passé sans les connaître. Sa maison d'édition Les Lettres nouvelles, puis Éd. Maurice Nadeau, a fait connaître en France des écrivains tels, entre autres, que le Polonais Gombrowicz, l'Africain du sud Coetzee (prix Nobel en 2003), le Suédois Stig Dagerman, l'Argentin Hector Bianciotti, le Gallois Malcolm Lowry, le Sicilien Leonardo Sciascia ou les Français Claire Etcherelli, Michel Houellebecq, Angelo Rinaldi... Bref, un découvreur. Mais à l'heure où plus personne – ou presque – ne lit, du moins de la littérature, le bimensuel bat de l'aile et a sérieusement besoin d'être renfloué. Vous pouvez donc envoyer vos dons et recevrez un reçu fiscal, ce sera une bonne œuvre de mécénat (site internet : http://www.quinzaine-litteraire.presse.fr/quinzaineenperil.php).


Parmi mes dernières lectures, une pièce de théâtre de Balzac : Le faiseur. On sait que Balzac, comme Flaubert, n'a pas eu de chance ni de succès au théâtre. C'est une comédie réjouissante (si on veut, car le héros, au bord de la ruine, est prêt à vendre sa fille unique à un mari qu'il croit riche !) sur le monde de la spéculation, où rien ne semble avoir changé depuis les années 1830. Le "faiseur" en question serait un "trader" aujourd'hui. J'ai relevé cette remarque d'un des personnages, Minard : "Oh ! la misère !... elle a dévoré peut-être autant de belles amours que de beaux génies ! Avec quel respect nous devons saluer les grands hommes qui la domptent, ils sont deux fois plus grands !"...
Et au cinéma, puisque le catholicisme est à la mode (voir les soi-disant « manifs pour tous », qu'ils noyautent avec vigueur, ça fait peur au bon vieux parpaillot laïque que je suis), ne manquez pas Paradis : foi, le deuxième volet de la trilogie autrichienne sur les trois vertus théologales d'Ulrich Seidl. Paradis : amour, le premier, dénonçait justement l'absence d'amour dans le monde actuel. Le deuxième dénonce la caricature de la foi, quand on est dans l'intégrisme pur et dur : l'héroïne passe son temps à courir les appartements pour convertir les gens (scènes assez crignolesques), mais n'est même pas capable d'assumer la lourde charge de s'occuper de son mari paraplégique. Elle chante l'amour, mais ne peut pas le pratiquer. Un film impitoyable !

Affiche du film Paradis : Foi
Comme disait Paul Éluard, "Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous." Pour en terminer avec le mariage – promis, je n'en parlerai plus ! – le masque est tombé dimanche, dans les interviews que je lis dans la presse ; on voit clairement – et ils ne s'en cachent plus – que derrière le mariage à réserver aux « normaux » selon les cathos, le débat porte bien sur l'apparition trop voyante des homosexuels dans la vie publique : on va donc bientôt les voir s'embrasser à la sortie de la mairie. Ah ! s'ils pouvaient rester dans leur placard, comme tout serait pour le mieux dans le meilleur des mondes ! La palme d'or de Cannes va-t-elle modifier la donne ? Je viens de lire le petit pamphlet Le mariage est une mauvaise action, de Voltairine de Cleyre, une féministe américaine du début du XXe siècle, où elle dénonçait la "relation de dépendance permanente" que créait alors le mariage, "moyen le plus facile, le plus sûr et le plus répandu de tuer l'amour." Rien de changé aujourd'hui, et je suis assez d'accord avec elle, d'où les si nombreuses mésententes, haines conjugales et les fréquents divorces. Mais si de nouvelles sortes de couples veulent se mettre dans ce type de dépendance, pourquoi les en empêcher ?
En attendant, sauvons La quinzaine littéraire !

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