samedi 8 avril 2017

8 avril 2017 : Guadeloupe 2017 : choses vues


J’ai vu bien des aubes au cours de ma vie et encore maintenant, mais celles d’aujourd’hui relèvent seulement de ma manie de me réveiller avec l’obscurité.
(Erri De Luca, Les poissons ne ferment pas les yeux, trad. Danièle Valin, Gallimard, 2008)

Qu’ai-je donc vu en Guadeloupe cette fois, outre l’amitié réitérée ? 

la Pointe des Châteaux, vue du bateau 
Les promenades ont été nombreuses. Finalement assez peu à pied, à cause de la chaleur et des pentes impressionnantes, mais enfin, nous sommes allés à pied voir le champ dévasté de Frédéric, où tous les arbres agrumiers ont été arrachés : une montée abrupte sur la route glissante à la suite des pluies, bordée d’arbres à pain, de fougères arborescentes et d’une riche végétation, et la descente du retour se révéla encore plus dangereuse ; nous sommes allés voir la deuxième chute du Carbet, dans la fraîcheur humide de la forêt tropicale ; une belle balade à pied aussi à la Désirade, jusqu’à Baie-Mahault puis jusqu’au monument au maire assassiné en 1991, Max Mathurin (je m’étais mis en marcel, et soumis au vent et au soleil, j’ai eu les épaules et le cou rougis) ; balade dans la vallée encaissée de Grand-Rivière, à Vieux-Habitants, où la rivière, lors des cyclones, peut drainer des rochers monstrueux.

une curiosité : un coq sur la plage de Malendure

Ceci a été complété par de nombreuses balades en voiture, car étant données les pentes et la chaleur, ça reste un moyen de découverte plus commode à nos âges. Nous avons ainsi fait un tour par Matouba (petites routes ultra-sinueuses qu'Yvon négociait en expert), Trois-Rivières et Vieux-Fort ; un grand déplacement vers la Désirade, en passant par les Grands Fonds de la Grande-Terre jusqu’à Saint-François, où nous avons laissé la voiture chez un ami d'Yvon ; à la Désirade même, nous avons utilisé une voiture pour aller à l’autre bout de l’île, puis pour monter jusqu’à Notre-Dame du Calvaire, petite chapelle sur les hauteurs près des falaises du nord ; une autre balade en voiture nous a menés sur les hauteurs de Gourbeyre, au lieu-dit Moscou (sans doute parce qu’il y fait plus frais qu’ailleurs) ; enfin nous avons fait la grande boucle Baillif-Malendure (arrêt à la plage) puis le col des deux Mamelles et retour par la côte atlantique. C’est là que j’ai pu constater le développement presque excessif du tourisme : les parkings près des sites (cascade aux écrevisses par exemple) étaient si bondés que nous n’avons pas pu nous arrêter ! D'ailleurs, on est frappé par l'ampleur de la circulation automobile et on se dit : mais comment faisaient-ils autrefois ?

un iguane près de notre gîte
Le voyage vers la Désirade se fait en bateau et dure 45 minutes. On longe la Pointe des Châteaux, ainsi nommée, car très battue par les vents et la mer, et vue d’un certain angle, la pointe ressemble à une ruine de château. On aperçoit au sud l’archipel de Petite-Terre, îlots inhabités, mais sur lesquels a été construit un phare. L’aller a été mouvementé, la mer est forte au passage du détroit entre la pointe des Châteaux et l’extrémité nord-ouest de la Désirade. Au retour c’était plus calme. Notre gîte (Club Caravelle) était très agréable, les petites églises sobres et dédiées à la mer (les Désiradiens sont pêcheurs d’abord), les éoliennes nombreuses (et paraît-il, pouvant assurer l’auto-suffisance énergétique de l’île), les quelques restaurants appréciables. On y voit beaucoup de chèvres, quelques iguanes et des agoutis, à la saveur extrême d'après Yvon et Michelle qui en ont mangé en Guyane. C’est une île à part, un havre de paix, j’y ai même rencontré un retraité belge qui a installé un café-épicerie et qui occupe ses nombreux moments de loisir à écrire des nouvelles et romans qu'il arrive à publier ! Nous y avons passé trois belles journées.

Dans l'église de Beauséjour, un bel autel en bois de poirier
et un bateau qui symbolise l'importance de la pêche 
Il faudrait aussi parler des rencontres. Invité à dîner chez Frédéric et Mathilde, j’ai découvert Solange, installée ici depuis une vingtaine d’années et son mari brésilien, Alfredo, musicien aussi truculent que son célèbre concitoyen et écrivain Jorge Amado ! Je ne parle pas des nombreuses personnes qui sont passées chez Yvon ni des Guadeloupéens que j’ai rencontrés lors de mes balades en solo à Basse-Terre, où je suis allé par deux fois à pied, auto-stop et bus ; dans les marchés, à la bibliothèque, dans les rues, sur les bords de mer ou dans les bistrots, partout j’ai rencontré cette même satisfaction de vivre, ces mêmes sourires et cette même affabilité que j’ai pu observer chez les matelots philippins. Forcément, on a envie d’être souriant à notre tour. Il y a sûrement des gens renfrognés, mal à l’aise, inquiétants même, comme partout. Mais je n'en ai guère rencontré.

Louis Delgrès, héros guadeloupéen de la lutte contre le rétablissement de l'esclavage en 1802
à qui je rends hommage dans un des poèmes de Danse sur les flots
 
À suivre...

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