lundi 11 juillet 2022

11 juillet 2022 : arpentage autour de Louise Michel (1830-1905)

 

c’est le bien qui est quelque chose d’anormal. […] Anormal, mais possible…

(Simone Weil, Venise sauvée, Rivages, 2020)


Finalement, mon rhume bien que très fort, a rapidement diminué, au point que j’ai pu reprendre mon atelier d’écriture (au GEM – Groupement d’Entraide Mutuelle) du vendredi matin, puis je suis allé samedi après-midi à la Maison des Femmes de Bordeaux (dont je suis, semble-t-il, le seul adhérent masculin) participer à l’arpentage du livre de Paule Lejeune, Louise Michel l’indomptable (Éd. des Femmes, 1977)1. Cette technique d’éducation populaire est née dans les cercles ouvriers à la fin du XIXème siècle , et a été remise à l’honneur pendant la Résistance et par les groupes d’éducation populaire nés de la Résistance, notamment "Peuple et culture", auquel j’ai participé dans les années 70, quand je travaillais à Angers.


                                                         Réédition chez L'Harmattan, 2002

C’est la deuxième fois que j'assistais à un arpentage à la Maison des Femmes. Les principes sont les suivants : les organisatrices choisissent un livre pour en faire une lecture commune à un groupe de personnes entre 6 et 20, là, on était 12. On découpe le livre en douze parties égales et on distribue les parts ainsi crées : chacun.e s’en approprie une. Chaque membre du groupe lit (tout seul) sa partie pendant une demi-heure, puis en restitue aux autres pendant environ cinq minutes ce qu’il en a retenu, dans l’ordre chronologique ou non du livre. 

Ainsi le livre-objet est désacralisé (on n’hésite pas à le déchirer), la lecture n’effraie pas les lecteurs timides (une vingtaine de pages sont à lire), on découvre un travail coopératif, on crée une culture commune autour de ce livre, de ses idées-force, de ce qu’il nous a apporté individuellement par rapport à notre vécu, sur le plan de nos émotions… Qu’est-ce que ça change éventuellement dans mon existence ou dans ma façon de penser ? On déscolarise ainsi la lecture, on entre plutôt dans une réflexion critique qui, au fur et à mesure que chaque membre évoque son ressenti, permet d’entrer dans un univers collectif de confrontation des idées. Quelles ouvertures deviennent possibles ? Puis le débat devient commun.


Il se trouve que je m’étais remis à Louise Michel depuis quelques semaines, et que j’étais en train de lire Le roman de Louise, une biographie écrite par le conteur et romancier Henri Gougaud, et quand j’ai reçu en cours de semaine l’avis de cet arpentage, je n’ai pas trop regretté de n’être pas allé à La Rochelle, dont le Festival de cinéma m’avait pourtant alléché. Et donc, ça tombait à point. Les discussions furent passionnantes. Et cet arpentage a donné à tout le groupe l’envie d’en savoir plus sur Louise Michel, de lire ses livres, de comprendre ses positions fortes mais aussi ses faiblesses. Ainsi, elle n’était pas favorable au droit de vote des femmes ! Mais n’est-ce pas elle qui écrivait dans ses Mémoires : "Nous ne valons pas mieux, sachez-le, que les hommes. Simplement le pouvoir ne nous a pas encore gâtées et corrompues".

1 L’arpentage est une méthode de découverte à plusieurs d’un ouvrage, en vue de son appropriation critique, pour nourrir l’articulation entre pratique et théorie. C’est une technique d’auto-émancipation grâce à laquelle un collectif peut s’apprendre mutuellement. (Sébastien Charbonnier)

 

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