mercredi 17 août 2022

17 août 2022 : l'air frais des matins

 

Tout le plaisir des jours est en leurs matinées ;

La nuit est déjà proche à qui passe midi.

(François de Malherbe, Stances?)



Alors que je m’apprête à partir pour l'île de Groix, voici que la canicule s’éloigne et qu’il se met à pleuvoir (très légèrement, pour l’instant, à Bordeaux), et que je vois qu’il faudra que je me couvre : on n’annonce pas plus de 19° pendant les quelques jours que je vais y passer.

Pas de quoi m’alarmer toutefois ! Je prends le temps comme il vient. J’avoue pourtant préférer le chaud, fut-il caniculaire, au froid ou à la pluie. Quand les journées sont chaudes, on peut toujours se lever tôt matin, en profitant des restes de fraîcheur nocturne. C’est ce que je faisais en Guadeloupe, où je sortais guilleret du lit à 6 h du matin, au lever du jour ; ce que j’ai fait aussi dans mes voyages tropicaux de ces dernières années : en Guadeloupe où je suis retourné en 2010, 2017 et 2020, en Côte d’ivoire (2016), à Cuba (2018) et Madagascar (2018). Sans parler de mes voyages en cargo (2010, 2013, 2015, 2019-2020), où, dès que j’atteignais les Tropiques, je tombais littéralement du lit, pour admirer à jeun toutes les nuances de la mer.

C’est encore ce que j’ai fait pendant les jours récents de canicule : levé tôt, je profitais de la période entre 7 h30 et 10 h pour aller faire une boucle à bicyclette, en respirant l’air encore relativement frais de la nuit. C’était un régal de bonheur, et je comprends mal les gens qui traînent au lit jusqu’à 9 h ou plus et qui se plaignent, ensuite, de la chaleur. Que n’ont-ils écouté Malherbe dans ses Stances : "Tout le plaisir des jours est en leurs matinées" ? Et ça ne m’empêchait pas de ressortir l’après-midi, car rester enfermé avec les volets fermés toute la journée, très peu pour moi ! Je me remémore mes trois semaines à la Désirade, où j’arpentais tous les jours, en partant le matin, la côte rocheuse et les falaises, croisant quelques autochtones, et ici où là des iguanes et autres agoutis, sans parler des oiseaux marins : un séjour absolument déconnecté pour ma part de tout cet encombrement technologique qui nous coupe des autres (réseaux sociaux si mal nommés) et favorise le narcissisme (ah, ces selfies, comme si chacun était le nombril du monde). Non, la nature à humer, les arbres à embrasser, les chemins écartés, le ciel, la mer...

Ici, évidemment, ce n’est pas la même chose. Mais en ville, ou en proche banlieue, on peut trouver des rues et des routes tranquilles, des pistes cyclables ou des chemins de traverse, pour profiter des matins calmes. Et des parcs pour se reposer un instant, avant l’invasion des "zombies technophiles", et prendre son carnet ou un petit livre qu’on a apportés dans sa besace, y noter des choses vues ou une phrase, un vers qui nous ont plu !

Tiens, à propos de livres, je lis un roman d’Amélie Nothomb, Soif (Albin Michel, 2019), où l’auteur donne la parole à Jésus, le jour de son procès et de sa condamnation, la nuit en prison qui a suivi, le chemin de croix et l’agonie de la crucifixion. Chemin faisant, il se remémore quelques moments-clés de sa vie. Ce n’est pas le grand roman que j’attendais (je préfère La dernière tentation de Nikos Kazantzakis), mais seulement un bon roman, ce qui n'est déjà pas mal. L’auteur fait dire à Jésus quelques aphorismes qui m’ont intéressé : "La condition humaine entière se résume ainsi : ça pourrait être pire" (à méditer quand on est confronté à de gros problèmes), "Comment sait-on qu’on a la foi ? C’est comme l’amour, on le sait" et celui-ci qui nous ramène à l’objet de cette page : "Il m’est déjà arrivé de pleurer de plaisir en respirant l’air du matin". Encore un qui devait se lever tôt !

 

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