Pour
Simone Weil, c’est là le tout du sens moral et c’en est toute la
difficulté : être capable de se rendre attentif à la réalité,
d’être concerné, modifié, voire défait par ce qui est.
(Gérard,
Valérie, préface à Weil, Simone, Amitié : l’art
de bien aimer, Rivages poche,
2017)
Vous
savez que je lis peu la presse, presque en totalité inféodée aux
puissances d’argent, et qui est parasitée par la publicité. Même
Télérama, auquel je
suis abonné depuis 1970, est devenu un sac à pubs, dont le contenu
informatif a fortement baissé. Mes seules lectures hebdomadaires sont donc
L’humanité-dimanche
et Réforme :
sérieux tous deux, orientés tous deux (communiste / protestant, ça fait une belle moyenne), mais presque exempts de pub,
et avec des articles de fond solides. En mensuel, je n’en lis plus
que deux ; La décroissance
et Siné mensuel. Tous
les articles de ces quatre organes de presse m’intéressent, même si je ne suis pas toujours
d’accord avec eux.
J’ai
commencé à lire Siné mensuel
quand Siné a été viré, très malproprement, de Charlie
hebdo, par Philippe Val ;
"Siné
sème sa zone"
était la seule demi-page que j’arrivais encore à lire dans cet
hebdo qui s’épuisait et qui ne s'est guère amélioré depuis. Dans
Siné mensuel, je
trouve chaque mois une pâture excellente, tant en dessins qu’en
articles ou interviews, je le
lis comme La décroissance,
à petites doses (puisque c’est mensuel et qu’on a donc le
temps).
Ce
mois-ci une triple page a attiré mon attention, titrée :
"Damien
Carême : Sur les migrants, Macron est pire que Sarkozy et
Valls".
Damien Carême est maire de Grande-Synthe, tout près de Dunkerque.
Il a créé un camp pour les migrants, sans le moindre sou de l’État,
qui ne proposait que d’envoyer les CRS, il sait donc de quoi il parle. Il dit : "Si les
associations n’avaient pas été là, la France serait la honte de
l’Europe, voire du monde entier." À propos du tri des
migrants, il dit : "S’ils quittent leur pays, leurs
attaches, leur histoire, leur culture, tout ce qu’ils ont, ce n’est
pas par plaisir !" Sur
la télé-spectacle, il dit : "Rencontrer des gens, voir
les solidarités, cela demande du temps et les médias ne le prennent
pas." Et il ajoute qu’une commune aide les migrants ne fait pas monter
le vote FN : "Au premier tour de l’élection
présidentielle de 2017, Grande-Synthe est la seule ville à 80 km
alentour à ne pas avoir placé le FN en tête." Et les
habitants de la ville disent : "On a été capitale
française de la biodiversité en 2010, maintenant on est aussi celle
de l’humanité." Damien Carême rajoute : "quand
on traite des gens comme des animaux, quand ils sont pourchassés,
traqués, malmenés, ils deviennent des animaux." Par ailleurs,
le maire travaille à l’instauration d’un revenu de base, et
annonce fièrement que dans sa commune, "l’accès à la
culture est gratuit, les transports le seront à partir du mois de
septembre, le repas à la cantine bio coûte de 0,4 € à 1,86 € ! Aucune coupure d’eau, de gaz, d’électricité, aucune expulsion
depuis quinze ans !"
Bref,
voilà un juste, et ce n’est pas la grande presse qui va nous le
montrer ! Comme l’est à sa manière le médecin de Lampedusa
(voir mon post du 18 décembre 2017). C’est si rare de notre
temps : chapeau !
PS : passe justement demain à L'Utopia de Bordeaux Behemoth, le film chinois qui m'avait enthousiasmé à Venise en 2015 (cf mon post du 18 septembre 2015).
PS : passe justement demain à L'Utopia de Bordeaux Behemoth, le film chinois qui m'avait enthousiasmé à Venise en 2015 (cf mon post du 18 septembre 2015).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire