dimanche 24 janvier 2021

24 janvier 2021 : les barrières invisibles

 

Compter l’âge des autres n’augmente que le nôtre…

(Mia Couto, Poisons de Dieu, remèdes du Diable, trad. Élisabeth Monteiro Rodrigues, Métailié, 2013)



 

Eh oui, l’âge est là ; 75 ans déjà ! Il est temps de m’inscrire pour la vaccination : tous les centres ici, à Bordeaux, affichent complet et je vais devoir attendre, comme doivent attendre ailleurs tous ceux qui redoutent le paludisme, maladie dont on n’a pas trouvé de vaccin pour la simple raison qu’il ne touche que les pays pauvres, donc incapables d’engraisser les actionnaires de Big Pharma (https://www.pasteur.fr/fr/vaccin-contre-paludisme-existe-t-il-vaccin-contre-paludisme-0) ! Voyez comme on est capable de s’activer quand il s’agit de lutter contre un virus qui ne touche pratiquement que les pays les plus développés (pays occidentaux, Asie orientale, Amérique). Miracle, on a vite trouvé, les actionnaires de Big Pharma savourent et vont engranger des royalties. Quant au palu, on attendra encore longtemps.

Pareillement, on attendra encore longtemps une loi sur la fin de vie digne, malgré les exhortations de Line Renaud (https://www.admd.net/articles/medias/fin-de-vie-le-message-personnel-de-line-renaud-militante-de-ladmd.html?utm_source=Sarbacane&utm_medium=email&utm_campaign=janvier), infatigable militante pour le droit de mourir dans la dignité et de choisir le moment adéquat pour éviter des souffrances terribles, morales et physiques. Je l’ai déjà dit, je ne souhaite pas vivre éternellement, et je veux choisir le temps de mon départ. J’espère que le pourrai, si on nous veut bien nous accorder cette dernière liberté. Mais l’heure est plutôt de restreindre toutes nos libertés : état d’urgence, état de guerre, loi sur la sécurité globale, loi sur le (soi-disant) séparatisme, fermeture de tous les lieux de culture, de sport et de convivialité...


* * *


Concernant le toucher, organe des sens qui fait le plus défaut aux personnes âgées, corporation où je suis définitivement entré, j’ai lu sur internet :


« La médecine moderne, malheureusement, donne parfois l’impression de négliger ce temps du toucher.

« Par exemple, lorsque les personnes arrivent dans des unités de soins palliatifs après des mois passés dans les services hospitaliers traditionnels, leur corps est souvent si fatigué et si abîmé qu’elles n’étaient touchées que lors de soins programmés (toilette, perfusion, etc).

« Pourtant, être touché sans prétexte, sans motif thérapeutique, cela porte une grande valeur pour tout malade.Sentir dans le contact, voir dans le regard de l’autre que l’on est encore vivant, digne d’être touché, regardé, respecté.

« L’infirmière Carine Blanchon va encore plus loin :

« Sans le toucher, la relation de soin ne peut pas exister. Chaque soignant devrait chaque jour s’interroger sur sa façon de toucher l’autre. Ne plus se cacher derrière un acte technique, dépasser le savoir-faire pour le savoir-être. C’est parfois difficile, mais tellement riche. On y gagne en humanité et en sagesse… »

« Et c’est peut-être la raison pour laquelle le coronavirus et la distanciation qu’il a engendrée créent aujourd’hui une privation si profonde. 

« Chez les bien-portants, d’abord, avec cette barrière invisible qui s’est dressée entre nous et qui fait que l’on se retient de se toucher, qu’on n’ose plus aller vers l’autre.

« Et chez les malades, bien sûr... chez qui cette distanciation forcée crée bien plus qu’un simple manque. Elle les met en danger, voire : elle peut les condamner, comme en témoigne sur son blog cette bénévole qui assiste les malades en fin de vie :

« Comment réduire la distance dans la chambre de cette jeune femme si angoissée dont je voudrais prendre la main, mais de laquelle je me tiens à plus d'un mètre, sans jamais la toucher ».

« Son corps appelle ma main, son regard me cherche, je m’excuse, explique, mais je sens que ma seule présence est insuffisante à calmer son angoisse. » 

« Voilà le dilemme d’aujourd’hui : maintenir le contact, et l’envie de vivre qui vient avec, ou isoler pour éviter un virus trop souvent mortel pour les plus fragiles... mais les livrer alors aux ravages de la solitude et du manque de lien physique.

« Derrière cette crise sanitaire, c’est aussi une crise relationnelle que nous traversons. »



On nous impose des barrières relationnelles dingues, voire inadmissibles. Comme une étoffe déchirée / On vit ensemble séparés, chantait Aragon repris par Jean Ferrat. Dire que je n'ai pas osé embrasser mes enfants qui sont venus me voir à Noël ! Enfin, j'ai quand même serré dans mes bras ma fille qui en avait bien besoin au moment de son départ ! Et la rumeur parle de reconfinement...

 

 

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